Mise en valeur du quartier "des Halles"

 

 

M. LE MAIRE DE PARIS. - Chers collègues, nous allons donc aborder, comme nous l'avions souhaité à la dernière séance du Conseil de Paris, le débat relatif à la mise en valeur du quartier des Halles. Il a été prévu un débat organisé.
Avant, je voudrais dire quelques mots très brefs.
D'abord, parce que ce dossier est difficile, je le vis comme une chance. Il s'agit du cœur de Paris et, quand il s'agit du cœur de Paris, cela concerne d'ailleurs, et ceux qui l'ont dit ont raison, bien au-delà de Paris. Il y a 800.000 voyageurs qui passent dans ce lieu chaque jour, et je partage donc l'opinion de ceux qui disent que l'enjeu dépasse Paris. N'ayons pas peur du fait que les questions que cela nous inspire sont extrêmement difficiles. Je crois que vouloir modifier les choses à cet endroit-là, les améliorer implique nécessairement que les questions que nous avons à nous poser sont difficiles. Ou alors, on ne fait rien. C'est comme cela.
Par ailleurs, peut-être qu'à Paris on n'était pas très habitué à la démocratie participative qui influe sur les projets. Eh bien, habituons-nous ! C'est même une bonne habitude. Vous savez, d'autres villes l'ont fait avant nous. Il y a quelques années à Londres, par exemple, lorsque les quartiers des gares ont été reconçus, il y a eu des débats avec la population qui ont eu une vraie influence et qui ont modifié les projets initiaux, qui les ont enrichis.
Moi, cet état d'esprit me convient assez. Je lis beaucoup de choses dans les journaux, et tant mieux qu'il y ait du débat. Mais je n'ai pas du tout l'impression que le dossier soit embourbé, non. Il vit une vie normale. Un sujet compliqué, surtout quand l'on se donne les moyens d'avoir les avis les plus larges, voilà, le débat c'est comme cela. Des analyses, des réflexions, des commentaires et des suggestions se font jour et, moi, je les trouve extrêmement nourrissants.
Je n'en dirai pas beaucoup plus à ce stade. Je crois que les quatre projets qui ont été présentés par les équipes d'architectes ont tous des aspects intéressants, mais qu'aucun ne peut être totalement convaincant en l'état. Donc voilà, c'est comme ça que nous devons continuer à travailler, réfléchir, nous poser des questions, chercher, en fait ! Je ne sais pas dans quel état d'esprit sont les collègues, mais je cherche. Je trouve que cette recherche est plutôt passionnante et qu'elle est réellement enrichie.
Je ne sais pas comment vous fonctionnez intellectuellement par rapport à un dossier aussi complexe, aussi subtil. Et j'emploie le mot "subtil" à dessein. Mais, personnellement, ma manière de travailler, c'est de me servir des points de vue de tous pour essayer de comprendre, essayer de trouver les bonnes idées.
D'ailleurs, que nos débats soient contradictoires, c'est bien légitime. Que nos débats soient créatifs, tant mieux. Ce qui compte, vous savez, ce que l'on en retiendra, ce n'est pas tout cela : c'est quand les travaux seront terminés, dans vingt ans, on ira s'y promener, si l'on est encore vivant, on sera vieux. Au-delà des traces, j'ai entendu des trucs sur les traces... Merci, Yves ! Yves a précisé que ce sera accessible aux personnes qui commenceront à être diminuées dans leurs déplacements ! Cela peut nous arriver à tous, Yves. C'est donc une hypothèse qu'il faut prendre en considération, tu as raison.
J'ai donc entendu parler, par exemple, de trace, que le Maire de Paris voudrait laisser sa trace. Mais ce n'est pas du tout mon problème. Vous savez, on oublie tout ça. En revanche, je ne sais pas si, dans vingt ans, on ira se balader en fauteuil roulant ou pas, mais j'aimerais que nous n'ayons pas honte de ce qui se sera fait. Voilà. Parce que, à ce moment-là, on aura le jugement réel. Donc, si aujourd'hui il faut quelques mois de confrontation d'idées, d'échanges, s'il faut recommencer...
Simplement, avant de vous donner la parole, je me réjouis vraiment, je pense que c'est une très bonne chose, d'abord, que l'on ait prolongé la possibilité pour les Parisiens ou les visiteurs d'ailleurs de s'exprimer.
Deuxièmement, je considère comme une excellente chose que le Conseil de Paris en débatte, échange. Simplement, je remercie tous les présidents de groupe d'avoir veillé à ce que le débat de ce matin soit extrêmement libre et qu'il ne perturbe pas le cadre strictement juridique de la C.A.O. Quand la C.A.O. se prononcera, elle disposera des débats du Conseil de Paris, mais nous avons un cadre juridique à respecter.
Je voulais vous dire cela très simplement avant d'ouvrir le débat, et je souhaite qu'il soit le plus riche possible. Surtout, il n'y a pas de tabou et il n'y a aucun interdit sur un débat aussi passionnant que celui-ci.
Alors, les groupes ont 15 minutes chacun, mais certains groupes se sont inscrits à cinq pour 15 minutes ! Je veillerai tout de même à ce qu'il y ait équité et que chaque groupe dispose de 15 minutes. Organisez-vous donc de telle sorte que ce soit possible.
Je donne d'abord la parole à Georges SARRE.
M. Georges SARRE, président du groupe du Mouvement républicain et citoyen, maire du 11e arrondissement. - Monsieur le Maire, bonjour, chers collègues. Les élus du groupe M.R.C. approuvent totalement l'initiative que vous avez prise, Monsieur le Maire, de remettre à plat le dossier du secteur des Halles, de soumettre son avenir à la concertation des Parisiens en les consultant par questionnaire, et d'organiser une exposition fort bien mise en œuvre par la S.E.M. Centre et dont le succès d'affluence démontre la pertinence.
Cette méthode va dans le sens de la démocratie de proximité, et c'est tant mieux. Elle rompt avec la pratique passée de l'opacité dans la définition des choix d'urbanisme, qui est une des raisons principales de l'actuelle situation peu brillante des Halles.
Pourtant, le quartier des Halles occupe un emplacement tout à fait privilégié dans le cœur historique de Paris. C'est le cœur de la première ville touristique du monde et la capitale de la France. A ce titre, il devrait être une destination de choix pour la promenade des Parisiens et des touristes.
Or, il n'en est rien. Les Halles ne sont aujourd'hui qu'un nœud de communication du réseau de transports souterrains, donc une zone de transit qui draine des centaines de milliers de voyageurs venant de toute la Région Ile-de-France. C'est aussi un centre commercial, mais où l'on ne fait que passer, le temps d'une course, car il est tout, sauf convivial et, une fois que l'on en est sorti, on n'a pas envie de rester dans le quartier.
En effet, au fil des années, les rues avoisinantes aussi se sont dégradées, tirées vers le bas par la baisse de qualité des boutiques du Forum des Halles. C'est une situation anormale qui ne doit pas durer, un gâchis.
La faute première incombe évidemment au Gouvernement de l'époque, la Ville de Paris étant alors dirigée par le Préfet de Paris qui décida de supprimer le pavillon Baltard. Funeste erreur !
En 1977, Jacques CHIRAC, devenu Maire de Paris, n'hésita pas, vous vous en souvenez sans doute, à s'autoproclamer "grand architecte du projet des Halles" et, après bien des tergiversations, hésitations, parvint tant bien que mal à combler le "trou des Halles".
Cet aménagement reste un lourd échec qu'en son temps j'avais dénoncé au sein de notre Assemblée.
Quel est aujourd'hui l'état des lieux aux Halles ? Il existe un jardin, aussi semblable à un labyrinthe que le centre commercial, d'ailleurs. Les problèmes de sécurité y sont avérés en raison des multiples angles morts, culs-de-sac, recoins et goulets d'étranglement.
La vidéothèque municipale est sous-fréquentée et, comme le quartier est à juste titre piéton, il existe un réseau de tunnel routier qui a l'inconvénient majeur de ne déboucher, rue Saint-Honoré ou dans le secteur de Saint-Eustache, par exemple, que sur de petites rues. La principale fonction des Halles actuelles est donc celle d'une gare qui aurait aussi bien pu être implantée ailleurs car il ne s'agit que d'une interconnexion. Bref, toute la copie est à revoir pour que ce quartier, qui possède des atouts évidents, reprenne sa vocation naturelle et historique de cœur de la Ville.
Bien entendu, mes chers collègues, Monsieur le Maire, nous ne reviendrons jamais en arrière. Il est impossible de réaliser un projet architectural qui retrouve les lignes du bâtiment du Paris ancien et des vestiges qui subsistent alentour du Paris du Moyen Age.
Autant le Marais proche a été préservé, autant les Halles ont été saccagées. Mais alors, au moins définissons pour ce quartier un parti pris d'aménagement à la fois réaliste et audacieux, qui soit à la hauteur de cet emplacement exceptionnel, qui projette la Capitale dans l'avenir, et qui soit un marqueur architectural et urbanistique fort pour notre Ville.
Monsieur le Maire, je me félicite qu'un premier pas ait été accompli avec le rendu des études de définition. Il faut maintenant, je le crois, franchir une étape supplémentaire en élaborant un programme comportant un cahier des charges dans le cadre duquel des architectes et des urbanistes devront proposer des projets.
Quelle est la différence entre des études de définition et un programme ? Elle est grande. Dans un programme, le maître d'œuvre, en l'espèce la Ville de Paris, dit au maître d'ouvrage ce qu'il veut faire. Et celui-ci, dans le cadre qui a été établi, propose un projet ; le maître d'ouvrage agit dans le cadre d'un programme qui le lie. Une étude de définition, elle, ne lie aucune des deux parties, c'est une sorte de concours d'idées. D'où le fait qu'aujourd'hui, nous sommes en présence - et c'est normal - d'études qui se contentent de tracer un cadre général.
L'une se contente de réaménager l'existant en y posant un tapis vert. Quant aux autres, elles donnent la nette impression que leurs concepteurs ont pris le parti - c'est en tout cas ainsi que je le ressens - de privilégier le côté ludique, l'inventivité, voire l'onirisme, parfois au détriment du réalisme.
Il faut donc que la Ville de Paris définisse clairement ce qu'elle veut. Je crois qu'il faut établir un programme précis qui devra trancher entre plusieurs hypothèses.
Quelles sont de notre point de vue, au M.R.C., les options fondamentales entre lesquelles il faut choisir ? Un problème essentiel est celui de l'importance respective que la Ville accorde à l'aménagement en surface et à l'aménagement en sous-sol.
Mon impression est que les études de définition éludent la question du sous-sol et se concentrent sur le visible, alors que la majorité des visiteurs des Halles vient pour le centre commercial ou, en tout cas, via le métro et le R.E.R. par le sous-sol. Donc nous avons un choix à faire : veut-on rentabiliser l'opération qui sera réalisée en surface en densifiant la partie commerciale ou veut-on au contraire la contenir ?
Autre choix décisif : en surface, les Halles se résumeront-elles en un jardin réaménagé par rapport à l'existant ou veut-on en faire un pôle d'attraction qui devra comporter nécessairement d'autres équipements, notamment publics ?
Troisième dilemme : veut-on implanter un monument qui marque le paysage, auquel cas son concepteur devra tenir compte de la proximité et de la perspective du centre Pompidou, ou souhaite-t-on simplement une esplanade doublée d'une promenade ?
Quels que soient, mes chers collègues, les choix réalisés, on ne saurait enfin esquiver la question du coût de cette opération pour la Ville de Paris, donc pour les Parisiens.
Le projet de mise en valeur des Halles, fort heureusement, est placé par la Municipalité dans une optique de grands travaux et non dans celle d'une simple opération d'aménagement. C'est dire que les moyens financiers et humains qui seront mobilisés devront être à la hauteur des enjeux. Néanmoins, il faut se garder des projets pharaoniques, la Ville doit rester réaliste et définir une enveloppe.
Pareillement se pose la question de l'échéancier de réalisation. Je pense qu'il ne faut pas se précipiter. Je souhaiterais donc savoir, Monsieur le Maire, si vous pensez pouvoir démarrer avant la fin de la mandature. Ce serait peut-être l'idéal, mais c'est loin d'être sûr.
Ce n'est pourtant pas, me semble-t-il, l'essentiel. D'autant qu'il faudra, une fois les programmes rendus par les architectes sélectionnés pour concourir, en revenir à l'indispensable processus de consultation des Parisiens. Ce qui sera réalisé aux Halles restera marqué dans le paysage pour longtemps, inutile donc d'aller trop vite.
Mes chers collègues, en conclusion, je pense que nous ne pouvons pas nous satisfaire des 4 études de définition présentées. Nous ne pouvons pas nous contenter de la plus sage qui, en termes d'innovation et d'ambition, est aussi la moins-disante. Nous ne pouvons pas accepter les autres qui donnent l'impression d'avoir été conçues moins pour être retenues, comme si leurs créateurs avaient pensé qu'ils n'avaient aucune chance et que, finalement, ils auraient fait un travail de qualité pour publication dans les revues d'architecture.
L'enjeu de la mise en valeur des Halles est déterminant, vous le savez bien, pour l'avenir de Paris. Je préconise une méthode et la recherche d'objectif. C'est dans cette voie, que je crois positive et réaliste, qu'il faut ensemble avancer.
Je vous remercie.
M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.
La parole est Alain LE GARREC.
M. Alain LE GARREC. - Merci.
Monsieur le Maire, mes chers collègues, ce projet qui fait venir tant de visiteurs à l'expo, écrire tant d'articles dans la presse, qui suscite tant de polémiques, était inscrit dans ce qui s'est passé il y a moins de 30 ans et après.
On a voulu dans un même lieu géographique construire en sous-sol à moins 20 mètres le pôle d'échanges majeurs qui structure encore aujourd'hui tout le système de transport collectif parisien et francilien. Puis, on l'a enclavé dans un centre commercial et ceinturé d'une voirie qui devait être le pendant routier souterrain du R.E.R. De plus, nous sommes dans un milieu de très dense population.
Sans ligne directrice, on a fabriqué un monstre tentaculaire qui ne fonctionnerait que s'il est en constante surveillance, en constante adaptation et en constant renouvellement. Comme un vieux jouet, il a fini par lasser les politiques qui s'étaient pris pour des architectes et, pendant 20 ans, on ne s'en est plus préoccupé.
Quand les constats et les études ont montré une dégradation irréversible des lieux et qu'un vent de mécontentement montait chez les habitants, un adjoint malin a décidé de vendre. Courage, fuyons !
Bertrand DELANOË - vous m'excuserez, Monsieur le Maire -, responsable de l'opposition s'exprimait alors - et je vous cite - : "Ainsi, la vente que vous envisagez des emprises situées aux Halles me paraît totalement contestable car vous priveriez ainsi la collectivité d'un levier important dans le réaménagement urbain d'un pôle situé au cœur de la cité et dont on sait que, tôt ou tard - je préférerais tôt -, il doit être complètement repensé et que, pour le repenser, nous avons besoin précisément de ces lieux".
Quatre ans après, Monsieur le Maire, nous ne faisons que ce que nous avions dit. L'adjoint malin, lui, se contentait de dire en décembre 2002 que le Maire de Paris avait déjà tout décidé dans le silence de son cabinet, que la S.E.M. Paris-Centre ne serait qu'une boîte aux lettres dans cette opération.
Aujourd'hui, le Maire du 1er vient de sortir une magnifique brochure sur papier glacé, expliquant en quelques mots les projets en donnant des chiffres à vérifier et quelques articles de presse tronqués. Il lui faut maintenant courir après les 75.000 visiteurs de l'expo, les 8.000 bulletins d'expression, les 100.000 connexions Internet. Alors, comme je le disais il y a un mois en paraphrasant Cocteau, et c'en est une nouvelle preuve, le maire du 1er n'entendant rien à la concertation feint d'en être l'organisateur.
J'ai toujours admiré chez certains cette faculté de dire tout et son contraire avec la même conviction. Au Québec, on dirait "qu'il a du front tout autour de la tête".
Nous avons aujourd'hui 4 concepts, 4 visions. Les premiers concernés ont été les habitants, il n'est dans l'esprit de personne de les oublier. Nous avons ici à gérer de façon spectaculaire une dimension locale et une dimension métropolitaine. Notre problème n'est pas de draguer les habitants, mais de leur parler en citoyens responsables. Nous le prouvons depuis 18 mois et nous continuerons. J'ai utilisé le mot "gagnant-gagnant", j'ai remarqué qu'il avait été entendu puisque repris par les associations.
Je voudrais, puisque beaucoup a été dit, revenir sur 3 questions fondamentales qui ont été posées et qui seront traitées avec l'équipe qui sera choisie par la C.A.O. ; je répète que c'est une équipe et des concepts qui seront choisis, et non un projet en l'état. Les Halles sont la porte principale d'entrée de tous ceux qui veulent aller au centre de Paris sans prendre leur voiture. Ces millions de personnes, banlieusards pour les uns, Franciliens pour les autres, ont-ils le droit à une arrivée au centre de Paris de qualité ou non ? Si oui, les quatre architectes nous offrent à des degrés divers une arrivée plus ou moins spectaculaire, si non effectivement on rafistolera et dans quelques années on nous reprochera d'avoir manqué de courage et de discernement. Sans nier une réalité nous ne pouvons pas nous contenter de seulement conforter un centre commercial en en faisant le premier équipement régional. Voilà une question à réponses multiples que nous aurons à poser et à nous poser dans quelques semaines.
Ces millions de personnes qui arrivent et qui repartent dans des conditions de confort aléatoire ont-elles le droit à une vraie gare, un vrai pôle d'échange de qualité et en toute sécurité sans cette espèce d'impression d'enfermement ? Si oui, il faudra continuer à travailler avec la R.A.T.P. pour que les projets des architectes aillent jusqu'au bout de leurs propositions en cherchant à éliminer les contraintes, et non en s'y arrêtant sans cesse, sinon en pesant mes mots, Monsieur le Maire, nous courons des risques, ce qui est une chose, nous en ferons courir à des centaines de milliers, ce qui en est une autre.
Tout le monde admet que le jardin des Halles est incontournable. J'ai lu beaucoup de commentaires plus doctes les uns que les autres sur ce quartier et la méconnaissance des architectes pour son histoire, son passé... ce jardin qui est devenu le symbole à lui tout seul de ce quartier en est son exacte antithèse historique. Les meilleures explications d'une ville ne sont donc pas des données figées, une ville ne vit qu'au présent. Ce jardin a été contesté, il ne l'est plus. Les associations indépendantes ont décidé il y a cinq ans d'y faire des animations, je voudrais les en remercier, leur rôle a été essentiel. Cependant, ce jardin, objet de tous les fantasmes qui mesure 43.000 mètres carrés au sol n'accorde à nos pas et à nos séant que 19.000 mètres carrés, les 24.000 mètres carrés qui manquent à l'appel sont soit minéraux, soit interdits au public car servant de camouflage à tout un tout un tas d'émergences de sécurité et autres cabanes de jardiniers sans oublier les élégissements qui commencent à s'effriter et à fuir en sous-sol.
Les quatre équipes aplanissent et offrent toutes, je dis toutes des milliers de mètres carrés supplémentaires au sol. On appréciera telle ou telle approche, nous sommes en 2004 et avec tout le respect que je dois aux jardiniers du XVIIe siècle, nous pourrions souffrir d'autres solutions. Ce choix est ouvert.
Enfin, et je raccourcis, nous avons décidé tous bancs confondus que la circulation automobile au centre de Paris n'avait pas d'avenir, mais dans un même temps nous avons aussi admis que le centre historique de la Capitale ne devait pas se muséifier.
Mais comment alimenter ces commerçants sans générer un transit important. Après moult discussions, merci Denis BAUPIN de m'avoir écouté, la R.A.T.P. a accepté de faire une étude pour définir comment nous pourrions marier aux Halles, voies ferrées de sous-sol et fret. Là aussi deux choix, comme c'est difficile et innovant, on peut laisser tomber, c'est ce que j'entends le plus souvent ou bien on décide de s'en donner les moyens et on le fait. Je peux assurer sans me tromper que c'est faisable, et que si l'on s'en fixe l'objectif, en quelques années nous y arriverons.
Enfin, avant de ne pas conclure, je voudrais tenir une promesse faite la semaine dernière après une visite organisée pour une quarantaine de malentendants. Le nouveau site des Halles doit être exemplaire en ce qui concerne l'accès et la circulation à tous les handicaps. Je devais vous le dire, c'est fait.
Donc pour toujours ne pas conclure, je dirai que je n'ai donné que quelques pistes, il y en a beaucoup d'autre comme transformer la Bourse de Commerce en Maison de l'Europe. Nous avons commencé à analyser les 7.500 bulletins d'expression, nous publierons dès que possible les premières synthèses. Dès l'automne, nous aurons à affiner notre exposition et nous préparer à l'après choix. La vraie phase d'élaboration du projet ne commencera qu'alors. Et je ne vois pas au nom de quoi nous ne pourrions pas continuer cette élaboration collectivement.
Je laisserai Dominique BERTINOTTI et Patrick BLOCHE nous parler de la nécessité de créer un centre de Paris pour les Parisiens, mais surtout pour les non Parisiens qui y viennent par millions, un urbanisme et une architecture qui redonne à Paris la place qui est la sienne, et qu'elle a perdu par conservatisme et ce mot se décline en plusieurs couleurs.
Je vous remercie, Monsieur le Maire.
M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.
La parole est à M. Eric AZIÈRE.
M. Eric AZIÈRE. - Merci Monsieur le Maire.
Mes chers collègues, en écoutant tout à l'heure, Monsieur le Maire, votre propos d'introduction, je me disais que jamais l'expression "marcher sur la pointe des pieds" n'aura été aussi juste pour décrire la démarche qui est maintenant la vôtre sur ce qui sera, certes, le plus grand projet d'urbanisme de votre mandature.
Oui, c'est votre style en tout cas.
Voilà que respectant presque une tradition dans ce quartier des Halles périodiquement bouleversé, ce qui devait être une mise en valeur est subrepticement devenu un réaménagement avant d'être maintenant attendu par l'opinion comme un grand geste d'architecture.
Vous aviez recommandé, Monsieur le Maire, de faire preuve dans ce dossier d'innovation et de pragmatisme. Il faut, disiez-vous, corriger, pas détruire. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le pragmatisme s'applique à votre gestion de ce dossier, et l'innovation aux projets portés. Mais tout ceci, avouez-le, manque un peu de clarté dans les intentions.
Ce débat et le vote dans la salle annexe sont à mettre au crédit de l'U.D.F. car comme s'en étonnait Yves GALLAND lors de notre précédente séance, je cite : "Il est paradoxal que dans l'extrême volonté de concerter l'opinion et les Parisiens, seuls les conseillers de Paris ne soient pas réellement consultés".
Pourtant, le temps d'une diversion sur un débat fameux, les tours ou pas les tours, piège dans lequel nous sommes tous tombés, voilà que la partie de bonneteau urbain prend fin et que se précise enfin le vrai programme d'aménagement que vous portez. Cette précaution, répétée tout à l'heure dans l'affichage de vos intentions réelles, voire de votre projet pour ce quartier des Halles, induit un comportement pervers où le secret, la solitude ou l'isolement peuvent précéder la prise de décision.
A cela s'ajoute le dédale et la complexité de la procédure choisie, la confusion des publics visés dans la consultation, enfin, le flou du calendrier et l'absence totale de chiffrage qui emportent et emballent les éléments du débat. Mais ce débat au sein du Conseil de Paris a le mérite d'une remise à l'heure de nos pendules respectives, et je vous en remercie.
Je ferai un premier constat. Paris a soif d'architecture, c'est évident. L'engouement autour des quatre projets a cet intérêt qu'il révèle à quel point les Parisiens sont partie prenante et favorables à une forme de réflexion sur leur ville au futur et sur les grandes options d'architecture contemporaine. 60.000 visiteurs pour une exposition que l'on croyait destinée à la simple information des riverains et autres Parisiens et qui devient un fantastique succès, presque culturel ainsi qu'un espace de dialogue et de débat inespéré, c'est une preuve de vitalité pour notre Ville dont nous pouvons tous nous réjouir. Rem KOOLHAAS disait tout à l'heure que Paris est tellement parfaite qu'elle est presque morose. On peut compter sur lui et surtout sur les Parisiens pour secouer cette morosité. Il faut croire en effet que l'attente et la demande de modernité sont fortes chez les Parisiens. Ce n'était sans doute pas là le but majeur recherché, mais il convient de mettre ce succès au crédit des organisateurs de l'exposition et de la qualité des prestations fournies par l'équipe de la S.E.M. qui en avait la charge.
Pour autant, peut-on se satisfaire au terme de cette période, de la consultation initiée ? La richesse du débat, la concrétisation sous forme de maquettes des quatre projets trop architecturalement aboutis ont focalisé l'attention de l'opinion sur les aspects esthétiques et ergonomiques de l'opération, davantage que sur les véritables problématiques urbaines.
La méthode utilisée des marchés de définition n'est pas contestable en la circonstance et l'U.D.F. l'a toujours approuvée, mais à condition d'en respecter l'esprit. Si ces marchés d'étude permettent d'éclairer le choix de la personne publique en mettant à sa disposition des éléments relatifs à la faisabilité de l'opération, ainsi qu'à son phasage, à l'estimation de son coût et aux techniques les plus éprouvées pour y parvenir, ils ne peuvent être pour autant employés pour palier l'absence d'études préalables ou la maturation insuffisante du programme comme il semblerait que ce soit le cas ici. A ce stade de la réflexion s'installe une frustration voire un malaise. On a le sentiment que des études, notamment sociologiques, prenant en compte la dimension francilienne de ce site hors du commun auraient pu permettre d'en approfondir la compréhension et de le replacer dans un cadre géographique beaucoup plus large. La réalité, c'est que les Halles sont aussi un véritable parc d'attraction pour la banlieue. C'est en quelque sorte Paris-Parc pour prix d'un ticket de métro. C'est un tiers de Parisiens et deux tiers de Franciliens. C'est le noeud modal d'une métropole de 8 millions d'habitants, et je ne ressens pas la prise en compte de cette évidence dans cette première phase de consultation.
Monsieur le Maire, si Paris n'ouvre pas sa politique urbaine aux autres habitants et acteurs du tissu dans lequel nous vivons, alors nous risquons d'enfermer notre pensée dans un nouveau fort des Halles. Sans doute aurait-il fallu donner plus de temps à la phase préparatoire que vous voulez achever maintenant. Cette procédure est aujourd'hui prisonnière d'un calendrier fixé d'avance comme révélateur d'une intention d'agir coûte que coûte et bien dissimulée.
A ce titre, sept mille bulletins recueillis grâce à l'exposition, c'est un chiffre satisfaisant à l'échelle d'un quartier, mais non à celle dont nous parlons.
Pourquoi ne pas engager une enquête d'opinion de vaste ampleur en direction des usagers du R.E.R., métro et bus qui convergent vers ce forum en amenant quotidiennement huit cent mille personnes ?
Comme nous le demandions en juin dernier, nous aimerions, à l'U.D.F., disposer de certitudes sur le traitement réservé à ces bulletins et sur leur influence réelle sur la décision de la commission d'appel d'offres. Quel effet auront-ils ? Quelle valeur reconnue, ou quelle utilisation faite, de ces principes et recommandations ?
On nous dit que les avis recueillis seront un des éléments d'appréciation de la C.A.O., mais parmi combien d'autres ? Dans quel ordre de présentation ? Avec quel coefficient d'évaluation ?
D'ailleurs, la question pourrait se poser en termes plus polémiques. Cette consultation a-t-elle une vertu autre que d'animation et de conditionnement des esprits avant une décision solitaire peut-être déjà prise ? Surtout, quelles garanties avons-nous qu'elle ne serve d'alibi à un choix qui serait déjà programmé ?
Il y a en effet un monde, comme vous le rappeliez tout à l'heure, Monsieur le Maire, entre la démocratie participative et la démocratie directe.
Ne pourrait-on pas considérer les études présentes comme une simple étape dans une réflexion plus régionale qui prendrait en compte les études prospectives de déplacement et d'accroissement des flux en Ile-de-France ?
Des quatre partenaires principaux, la Région est trop discrète et dispose pourtant d'instruments d'études comme l'I.A.U.R.I.F. qui serait bien utile dans cette phase préalable.
Pour désengorger les Halles, il est nécessaire d'ouvrir une réflexion complémentaire plus large sur les connexions et les échanges entre les gares parisiennes et franciliennes.
Pourtant, deux des trois objectifs d'aménagement clairement définis relèvent d'une problématique d'agglomération parisienne, c'est-à-dire le traitement de l'espace public et celui du pôle ferroviaire. Il nous semble qu'il faudrait approfondir la concertation ; après les riverains, les associations et les Parisiens, c'est auprès des usagers, clients, salariés, franciliens, qu'il faut recueillir les propositions et les avis. Ils sont plus des deux tiers des quarante et un millions de visiteurs annuels, soit plus de vingt-cinq millions de Franciliens, chiffres qui ne cesseront de s'accroître, et vis-à-vis desquels les projets présentés sont discrets.
Sur le périmètre concerné, il convient pour nous de ne pas déplacer le programme d'aménagement au-delà de l'espace défini par le quadrilatère des Halles. Il ne s'agit pas de recréer un quartier dont d'ailleurs l'esprit demeure, contre vents et marées, malgré des années de travaux, mais d'améliorer la qualité des espaces, la qualité des services, la qualité de circulation, la qualité de sécurité, la qualité des échanges entre Paris et sa banlieue.
Aujourd'hui, les difficultés ne sont pas d'ordre architectural, mais avant tout une question d'optimisation des flux d'hommes, de véhicules et de marchandises dans le cadre concerné.
Dans cet esprit, il conviendrait de ne pas remettre les Halles en chantier pour dix ou vingt ans en substituant une forêt de grues aux espaces végétalisés.
Le rétablissement ou la création des liens entre le monde souterrain et la surface, les jardins et les espaces piétonniers doivent être clairement priorisés, mais surtout, les contraintes d'une nouvelle forme de dangers contre la sécurité urbaine créée par le terrorisme de toute origine doivent être prises en compte au meilleur niveau d'efficacité pour la sécurité des usagers et leur évacuation.
Aucune conception architecturale, aucun équipement, aucun espace, aucune voie de circulation d'aucune sorte ne devra faire l'économie d'une étude prenant en compte ces nouveaux impératifs de sécurité civile. Des solutions d'évacuation du public de plein-pied à l'air libre doivent être favorisées.
Concernant les surfaces supplémentaires, l'exposition ne présente à aucun moment le décompte des surfaces ajoutées ou retranchées aux différents niveaux de l'ensemble des Halles. Qu'il s'agisse de commerces, d'équipements publics, d'hôtels, de bureaux, de voiries souterraines, on reste dans le flou.
Comment se partagent les commerces et les équipements publics ? Les chiffres toujours globaux ne traduisent pas véritablement la réalité recouvrée. Il est à noter qu'aucun des projets ne prévoit de logements.
En tout état de cause, il est indispensable d'étudier les différents aspects et leurs conséquences économiques, sociologiques et urbaines d'une offre nouvelle sur les surfaces supplémentaires. Rien, dans aucun projet, n'intègre cette étude.
Un véritable programme devrait prendre en compte et prévoir l'évolution de l'armature commerciale de ce centre et son extension ainsi voulue. C'est un des points clés du projet.
Nous sommes aussi très attachés à la sauvegarde de l'urbanisme historique. Détruit, remodelé au fil des siècles, ce quartier est bien vivant, mais laisse inconsolable ceux qui connaissent le prix de ces destructions.
En aucun cas nous ne pourrions admettre un aménagement altérant ce qui reste du paysage historique de Paris. La perspective de Saint-Eustache ne peut être gâchée. La mise en valeur de la Bourse du Commerce doit être retenue, comme devrait être repensée la valorisation de ce joyau qu'est la Fontaine des Innocents et qui se dégrade tristement. Un projet d'architecture contemporain peut parfaitement s'insérer dans ce contexte historique.
Enfin, les espaces libres. La plupart des associations ont dit leurs inquiétudes des conséquences d'un projet qui réduirait la surface consacrée aux jardins publics. Deux des quatre projets préservent chacun à leur manière ce grand espace gagné sur la ville lors du démantèlement des pavillons Baltard, même si les tours de l'un et le carreau de l'autre font écran à certains endroits.
Je note que le verre en tant que matériau est très présent dans les quatre projets. Il ne faudrait pas lui conférer toutes les vertus ou une destination qui n'est pas la sienne.
En effet, un jardin virtuel, même soutenu par la lumière et des métaphores reste une illusion de jardin et ne peut se substituer à un écosystème végétal.
Le projet retenu devra être pour nous une invitation à la promenade, au calme dans un jardin unitaire de 4,3 hectares, mais aussi tout simplement au beau auquel nous ont habitués les services techniques de la Ville et, souvent, sans maîtrise d'œuvre.
Pour conclure, il apparaît clairement que le mixage des projets dans l'esprit de ce que pourrait être un marché de définition n'est, à ce stade abouti des projets, pas possible. Dès lors, le choix à faire sera de toute façon le fait du prince. Souhaitons simplement qu'il soit un remède aux difficultés actuelles, qu'il soit un choix où l'art de vivre en ville et la qualité de la vie urbaine trouvent une traduction contemporaine pour cet hyper-centre urbain.
Je vous remercie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes Union pour la démocratie française et U.M.P.).
M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.
La parole est à M. Alain RIOU.
M. Alain RIOU. - Monsieur le Maire, mes chers collègues, nous sommes le groupe aux cinq orateurs.
Je n'exprimerai qu'une seule idée. Le débat d'aujourd'hui doit être utile, même s'il n'est accompagné d'aucun vote sur le fond. Vous vous apprêtez, Monsieur le Maire, à écrire aux équipes en course pour leur demander des précisions.
Dans la limite offerte par la procédure engagée, "Les Verts" souhaitent que ces précisions aillent le plus loin possible en termes d'orientations générales et de propositions particulières et cela, dans la plus grande transparence.
Bien évidemment, vous écouterez tout le monde, en particulier votre majorité, et, permettez-moi de le préférer ou de le suggérer, tout particulièrement "Les Verts".
Nos critères prioritaires en termes d'espaces verts, d'esthétique...
M. LE MAIRE DE PARIS. - Attention à la prétention ! J'écouterai tout le monde !
M. Alain RIOU. - ... d'esthétique, de densité, de respect des volumes, des hauteurs, des espaces et des perspectives, de limitation de la circulation automobile et de "piétonnisation", de fret, d'économie d'énergie et d'énergie renouvelable et tout le reste, nous semblent fondamentaux et les orateurs suivants des "Verts" vont les développer.
Nous ne saurions in fine ratifier en Conseil de Paris un projet, dès lors que la commission d'appel d'offres se sera prononcée, qui ne reprendrait pas tout ou partie de ces exigences ou qui ne pourrait, en termes d'évolutivité, les prendre essentiellement et finalement en compte.
C'est dans ce cadre que nous nous exprimons et que nous croyons de ce fait à l'utilité de ce débat sans vote.
Monsieur le Maire, mes chers collègues, je vous remercie.
M. LE MAIRE DE PARIS. - C'est tout à fait gentiment que je disais attention à la prétention. Attention aussi à l'excès d'autorité. Heureusement que je ne suis pas autocrate ! Parce que là, c'est : "Obéissez, Monsieur le Maire !".
Non, nous allons faire cela plus gentiment et plus collectivement car l'esprit collectif est à la base de la démocratie.
Maintenant, M. VUILLERMOZ a la parole.
M. Jean VUILLERMOZ. - Merci, Monsieur le Maire.
Nous sommes appelés aujourd'hui à donner notre avis sur le projet de réaménagement du quartier des Halles. Or, il nous semble qu'il nous faut être un peu plus précis que nous l'avons été jusqu'à maintenant.
Evidemment, la concertation est en cours et nous sommes, en ce qui nous concerne, pour que les élus du Conseil de Paris apportent leur contribution, car il s'agit de débattre de l'avenir d'un quartier majeur de Paris.
Tout en restant attentif aux suggestions que pourra apporter la consultation en cours et qui fera l'objet d'un développement dans les mairies d'arrondissements, je voudrais d'entrée, et pour couper court à tout suspens, vous dire que les élus communistes souhaitent marquer leur préférence pour la démarche innovante du projet KOOLHAAS, tout en prêtant attention à certains aspects apportés par Jean NOUVEL.
Cette préférence s'exprime à l'égard des projets proposés qui en aucun cas ne doivent être considérés comme des produits finis.
Ce choix bien sûr mérite d'être explicité au regard des objectifs que la Ville a fixé, visant à réparer les dysfonctionnements actuels constatés au Forum des Halles mais aussi, et surtout, pour placer le quartier des Halles dans une perspective de création urbaine contemporaine.
Parler de création urbaine implique en effet de prendre en compte dans sa totalité, la réalité complexe du quartier des Halles qui est tout à la fois un quartier de proximité, mais aussi un site urbain structurant du centre de Paris et la principale porte d'entrée de Paris, largement ouverte sur la métropole.
Les Halles, c'est un quartier, mais c'est bien plus. C'est à la fois et historiquement un espace commercial dynamique et très fréquenté, un point de rencontre, et un lieu de sortie au centre de Paris. Et il accueille 800.000 visiteurs par jour.
C'est en s'appuyant sur l'ensemble de ces enjeux que Catherine GÉGOUT, pour les élus communistes, a avancé un ensemble de questions lors du Conseil de Paris de juin dernier qui nous semblent devoir être traitées dans le réaménagement du quartier des Halles. Permettez-moi de les citer à nouveau :
- permettre dès l'extérieur d'identifier les activités du sous-sol par transparence ou par des pôles visibles ;
- le centre commercial doit-il être ou non le passage obligé pour toute fréquentation du Forum ?
- certaines de ses fonctions comme le R.E.R., la rue du cinéma ou d'autres doivent-ils faire l'objet d'une entrée distincte, structurant l'intérieur depuis l'extérieur ?
- comment traiter la gare d'échanges comme espace d'envergure ?
- le jardin doit être un seul espace perceptible d'un seul coup d'œil ou peut-il faire l'objet d'espaces divers articulés autour des identités du Forum ?
- doit-on assurer une continuité piétonne sur l'ensemble du quartier ?
- l'ensemble de ce lieu doit-il être accessible à tous ou doit-on accepter des activités nouvelles comportant un prix qui peut être discriminant ?
- doit-on ou non densifier les activités commerciales et les équipements ? Et si oui, jusqu'où ?
- quelles perspectives doit-on sauvegarder ? Quelle hauteur des bâtiments ?
- comment répondre à l'orientation de réduction de la circulation automobile et de développement du fret permettant l'approvisionnement du quartier et de réduction de la circulation des camions ?
- enfin, comment assurer un phasage des travaux permettant un maintien partiel des activités et provoquant le moins de nuisances possibles pour les riverains ?
Il nous semble que négliger l'ensemble de ces dimensions serait un contresens dommageable.
Le quartier des Halles, sauf à vouloir aller de réparation en réparation, a le plus grand besoin d'une réflexion globale, exigeante qui doit déboucher, à notre avis, sur une commande publique revue à la hausse.
Le fait d'avoir fait appel à des équipes d'architectes, d'urbanistes et de paysagiste de haut niveau est pour nous une incitation à travailler dans cette perspective. Et c'est pourquoi en la matière, nous considérons que le projet KOOLHAAS offre les possibilités les plus fortes, les plus innovantes, les plus porteuses d'avenir.
Il est celui qui pousse jusqu'au bout la réflexion sur le fonctionnement dégradé des circulations, des espaces souterrains composés d'activités commerciales, d'équipements publics. Dans son étude, il prend en compte également le jardin actuel, construit sur le Forum qui est complètement déstructuré et peu utilisé par les riverains et les nombreux visiteurs des Halles.
KOOLHAAS est à notre avis le seul à s'attaquer globalement et radicalement à ces dysfonctionnements en proposant de recomposer les interactions entre le jardin, les commerces, les équipements publics, le pôle d'échange des transports.
En poussant les contradictions jusqu'au bout, il permet un dialogue fructueux entre le dessus et le dessous du site. Pour y parvenir, il invente des axes, des découpes qui visent à organiser enfin les niveaux souterrains et à créer une ouverture, une grande galerie qui rend visible la gare du R.E.R.
On passe donc d'une organisation du chacun chez soi au tous ensemble.
Cette organisation nouvelle est confortée par la proposition de création d'émergences architecturales de hauteurs différenciées et raisonnables. Bien réparties sur le périmètre, elles augmentent les possibilités de relations entre la surface et les sous-sols, le dessous et le dessus, démultipliant ainsi les circulations et les accès. Ces émergences peuvent accueillir aussi les activités sociales, culturelles indispensables pour le quartier.
Enfin, la rénovation incontournable du jardin sinistré des Halles offre l'opportunité d'inventer une nouvelle manière de vivre la nature dans la ville sans pour cela aller rechercher le classicisme à la Française, mais en offrant une multiplicité d'espaces flexibles dans leurs utilisations. Le jardin doit lui aussi faire événement. Ce projet nous offre cette perspective de l'aménagement d'un nouveau parc qui respecte l'unité du site. Il la renforce même en permettant un accueil de qualité pour les riverains et aussi pour les visiteurs qui actuellement s'agglutinent dans des espaces réduits parfois problématiques. Il y a là, à notre avis, un enjeu important.
A propos du jardin donc des espaces verts, il faut savoir que ce projet avec 45.000 mètres carrés de superficie apporte 2.700 mètres carrés supplémentaires à l'existant. C'est le projet qui comporte le plus de surfaces vertes, loin devant les autres, par exemple celui de MANGIN qui, lui, propose 37.140 mètres carrés soit 5.360 mètres carrés de moins. Ce manque de 5.360 mètres carrés représente une superficie plus grande que les jardins d'Eole que nous allons créer entre le 18e et le 19e arrondissement.
Globalement, ce projet nous offre donc un parti pris d'aménagement contemporain, du XXIe siècle. Précisé, amélioré, car il reste de nombreuses questions en suspens, ce qui est normal (comme la gestion du fret, les circulations hors périmètre, etc.) et qui devront faire l'objet de propositions nouvelles, ce projet donnera au quartier des Halles une identité nouvelle remobilisant l'existant et lui offrant un avenir ayant tout à la fois une dimension locale, régional, nationale.
A notre avis, notre commande publique devrait donc pouvoir se hausser à ce niveau d'exigence. C'est la question essentielle qui est posée à notre collectivité au stade où nous en sommes aujourd'hui.
L'apport de Jean NOUVEL réside, lui, dans ses propositions architecturales de qualité. Ce n'est pas une surprise. Il reste que nous ne le suivons pas dans sa volonté de densifier le quartier, notamment en augmentant les surfaces commerciales de plus de 16.575 mètres carrés.
En la matière, nous considérons qu'il ne peut être question d'ajouter encore des commerces dans un quartier, au centre ville, où l'on en compte déjà beaucoup.
Par contre, ce qui manque beaucoup dans le quartier des Halles, à notre avis, c'est une présence visible, plus importante, d'activités à vocation publique.
Il nous apparaît donc utile d'envisager la construction d'un équipement public majeur, pourquoi pas à vocation régionale, témoignant de la centralité des Halles comme cœur de la Région Ile-de-France.
Il y a là, en relation avec le Conseil régional qui est impliqué dans le projet des Halles, un dialogue à instaurer pour affirmer cette vocation et imaginer, par exemple, l'édification d'un centre de ressources, de recherche grand public sur la Ville et sur la métropole, dans les domaines les plus divers (culture, expositions, rencontres, recherche).
La réalisation de cet équipement pourrait être confiée, à notre avis, à Jean NOUVEL.
Concernant le projet de Jean NOUVEL, je souhaite ajouter pour terminer, qu'il nous faut prêter attention aux solutions qu'il préconise en matière de circulation, de cheminements reliant les Halles à d'autres pôles du centre de Paris. Je pense par exemple à Beaubourg. Il intègre bien le périmètre des Halles à d'autres centralités.
Monsieur le Maire, en conclusion nous avons la conviction que l'aménagement futur des Halles est une opportunité pour que ce quartier de Paris ait toute sa place, son utilité sociale dans le Paris du XXIe siècle.
Le quartier des Halles mérite un projet urbain durable, contemporain, de qualité pour ses habitants, pour les Parisiens et pour tous les Franciliens.
C'est donc bien ce débat qui est ouvert dans le cadre de la concertation en cours et dans la perspective des choix qui interviendront prochainement pour choisir l'équipe ou les équipes qui auront à mener à bien la mise en valeur du quartier des Halles. Nous avons souhaité y contribuer.
(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).
M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup.
La parole est à M. LEGARET.
M. Jean-François LEGARET, maire du 1er arrondissement. - Monsieur le Maire, mes chers collègues.
Vous avez eu raison, Monsieur le Maire, de dire, en commençant : "C'est le cœur de Paris". C'est l'organe central, vital, sentimental qui bat au rythme de la vie de Paris et de la Région d'Ile-de-France. Et c'est ce qui donne une responsabilité toute particulière aux décideurs, quels qu'ils soient, à nous qui en débattons aujourd'hui, à la Commission d'appel d'offres qui devra se prononcer, et le choix est difficile, avant la fin de l'année, avez-vous dit.
Pour l'instant, ce que nous avons vu s'apparente à un jeu de construction : quatre très belles maquettes exposées qui ont attiré un large public, mais quatre maquettes sur lesquelles on voit des formes, des cubes de différentes couleurs qui ne traduisent pas une idée pour ce cœur de Paris.
Et puisqu'il s'agit du cœur, on a tous compris qu'on a le devoir aussi de réfléchir avant de tenter une opération à cœur ouvert. On sait que le choc opératoire sera lourd, important, qu'il prendra des années, que c'est une opération coûteuse. Les chiffrages pour l'instant n'ont pas été rendus publics mais, enfin, je ne crois pas trahir un très grand secret en disant que ce sont des projets qui se chiffrent à plusieurs centaines de millions d'euros hors taxes.
Alors, il faut sortir aussi des clichés et des poncifs. On a beaucoup parlé du terrible échec architectural commis il y a trente ans. On nous a beaucoup parlé de l'insécurité, encore que la situation se soit beaucoup améliorée grâce aux efforts de la Préfecture de police sous l'autorité du Gouvernement. Oui, c'est vrai ! D'ailleurs, il suffit de demander aux gens du quartier. Je pense que tout le monde vous le confirmera.
Les Halles ont toujours été, sont encore et resteront, quelle que soit l'issue de ce projet, un lieu marqué par une vie intense. Alors, il y a eu un débat et il y a une concertation, tant mieux ! Nous avions souhaité que les Parisiens puissent se prononcer par référendum et vous ne l'avez pas voulu. Mais que chacun joue son rôle dans la concertation qui est ouverte.
Pour ma part, avec les modestes moyens de la plus petite mairie d'arrondissement de Paris, j'ai réalisé ce questionnaire que je mets à la disposition de tous les élus qui voudraient en prendre connaissance, et qui se veut aussi objectif que possible.
Aujourd'hui, le meilleur choix ne consiste pas à ne pas choisir. Je dois vous dire que je suis très perplexe et bien incapable, au stade où nous en sommes, de déterminer lequel de ces quatre architectes pourrait conduire l'opération. Je crois qu'il s'agit de quatre bons architectes, et je n'ai aucune raison de penser que, quel que soit celui qui sera choisi, il ne soit pas capable de poursuivre une telle opération jusqu'à son terme.
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le remarquable entretien qu'un grand quotidien du soir a fait paraître hier avec l'architecte Paul CHEMETOV qui dit à peu près tout ce que l'on avait envie de dire sur l'ampleur et les difficultés de ce projet.
Aujourd'hui, c'est un projet, Monsieur le Maire, qui dépasse largement le cadre de votre mandature, de nos mandatures. Il s'agit d'une vraie responsabilité pour l'avenir du centre de Paris. Notre volonté n'est en aucun cas d'enterrer le projet mais, au contraire, de sortir d'une difficulté. Vous avez commencé votre propos liminaire en parlant d'une difficulté, Monsieur le Maire. Eh bien, de cette difficulté nous devons tous sortir par le haut en faisant preuve d'imagination.
J'ai eu l'occasion de dire et de répéter ce que nous ne voulions pas. Nous ne voulons pas diminuer la surface du jardin. Nous ne voulons pas augmenter les surfaces commerciales. Nous ne voulons pas poursuivre la vocation de cette voirie souterraine qui nous paraît être un équipement complètement dépassé, dangereux et inesthétique.
Nous voulons relancer un grand débat d'idées. L'urbanisme, l'architecture, cela consiste à traduire des idées dans des formes. Pour l'instant, nous avons vu des formes. Quelles que soient leurs qualités, quelle que soit leur beauté, quelles que soient les objections que cela puisse soulever, ce qui manque, c'est l'idée !
Vous aviez lancé un marché de définition qui est une procédure nouvelle et que nous maîtrisons encore mal, et nous pouvions espérer que ce marché de définition permettrait de faire émerger, de faire germer des idées. Malheureusement, nous sommes réduits au constat que le marché de définition n'a pas permis de dégager ces idées.
Alors, il y a de grandes idées. Je pense qu'il faut renforcer la présence culturelle, sportive, sociale. On a parlé de l'Europe, tant mieux. Parlons de la recherche. M.VUILLERMOZ a parlé de la Région, pourquoi pas ?
Voilà des idées sur lesquelles nous devons, je l'espère, nous mettre autour d'une table et essayer de réfléchir ensemble. Aujourd'hui, c'est une question d'imagination. Mettez, Monsieur le Maire, l'imagination au cœur de Paris !
M. LE MAIRE DE PARIS. - Un tout petit commentaire, vraiment très bref. D'abord, oui, c'est difficile mais c'est pour cela que c'est passionnant. Sinon, on ne fait rien, quoi ! C'est plutôt une difficulté qui me stimule, pour vous dire la vérité.
Deuxièmement, réflexion, réflexion, idées, idées... Il y a d'ailleurs des idées dans les quatre projets. A un moment, il faudra décider, ou alors on passe notre temps à remuer des idées. Moi, ça ne me fait pas peur, bien que je considère que ce soit délicat, subtil, fin.
C'est plutôt quelque chose qui rend notre mandat, à tous, intéressant, je trouve. C'est quand même normal que, pour le cœur - vous avez raison - de Paris, pour tout de même un certain échec urbain qui date de moins de trente ans, Monsieur LEGARET, les décisions ont été prises plus récemment dans la période -, que tous ensemble, et je vous remercie de votre contribution, on tente de faire œuvre de création urbaine.
Chacun a ses réactions face aux difficultés. Celles-là ont plutôt tendance à me mettre de bonne humeur, même si je reconnais que cela va être difficile, et les décisions ne me font pas peur non plus car c'est ainsi aussi que l'on honore nos mandats ; c'est en prenant des risques, simplement, en ayant réfléchi, le plus possible et le plus nombreux possible, pour faire en sorte que la création et le risque deviennent tout simplement de la vie.
Je donne la parole à Mme BERTINOTTI.
(Mme Anne HIDALGO, première adjointe, remplace M. le Maire de Paris au fauteuil de la présidence).
Mme Dominique BERTINOTTI, maire du 4e arrondissement. - Monsieur le Maire, mes chers collègues, effectivement, comme vient de le rappeler M. le Maire, la rénovation urbaine qui a eu lieu il y a trente ans dans le quartier des Halles a révélé depuis de nombreuses années des dysfonctionnements multiples en partie générés par des réalisations architecturales peu satisfaisantes : insécurité dans les espaces verts comme dans les espaces bâtis, non-maîtrise des flux excessivement importants de population. Véritable nœud de communication et pôle d'échange métro-R.E.R., le quartier des Halles aujourd'hui ne répond plus aux attentes des riverains et a perdu sa véritable identité.
C'est pourquoi je me félicite que la Ville de Paris, avec le concours de la S.E.M. Centre, ait décidé de lancer une très large réflexion sur le réaménagement des Halles afin d'apporter des réponses durables aux problèmes que connaît ce secteur.
Avec plus de 800.000 passagers quotidiens et 41 millions de visiteurs annuels au Forum, il est indispensable de repenser les Halles de façon globale, imaginative et ambitieuse en réussissant à trouver un point d'équilibre entre pratiques des usagers, des touristes, des riverains et des commerçants.
C'est ainsi que l'on pourra répondre aux exigences légitimes d'une capitale comme Paris, tout en tenant compte de l'impérieuse nécessité de qualité de vie des riverains. La question ne saurait donc concerner uniquement le 1er arrondissement ou, même, les arrondissements centraux. Mais, à travers le réaménagement des Halles, la question est bien de savoir quelles fonctionnalités, quelles activités nous voulons pour le centre d'une capitale comme Paris.
L'enjeu est de taille puisqu'il convient d'apporter des réponses urbanistiques appropriées en intégrant des échelles différentes allant de l'arrondissement à la Région, et en démontrant notre capacité à lier et concilier les différents intérêts : ceux du quartier comme ceux de la métropole. Ce défi nous concerne tous. Néanmoins, j'aimerais, comme maire d'arrondissement, attirer l'attention sur quelques conséquences locales perceptibles ayant trait aux problèmes de circulation automobile dans l'immédiate périphérie du Forum des Halles.
Si je me félicite qu'un réaménagement de la circulation souterraine des Halles soit prévu, celui-ci doit s'intégrer dans le cadre de la politique parisienne de déplacement qui vise à réduire la place de la voiture dans le centre de Paris. Or le déport d'une partie de la circulation souterraine des Halles sur deux axes importants du 4e arrondissement suscite quelques inquiétudes légitimes parmi les riverains, nombreux dans ce secteur.
Premier axe : la rue du Renard dans laquelle débouche de façon très insatisfaisante aujourd'hui une sortie de la voie souterraine, et ce, en plein cœur de plusieurs équipements de proximité : écoles, gymnase et bains-douches. Véritable verrue, cette sortie doit bénéficier d'une requalification pour améliorer l'environnement et les conditions de sécurité aux abords de ces équipements de proximité. L'absence de traitement ne serait pas comprise par les usagers et les habitants.
Deuxième axe : le boulevard Sébastopol qui pourra, lui aussi, éventuellement subir des reports de circulation importants au risque de créer une véritable frontière entre un quartier des Halles rénové et un quartier allant jusqu'à la rue du Renard, quartier très habité, qui se trouverait pris en étau par deux voies surfréquentées par l'automobile.
Face à ces inquiétudes, nous attendons des réponses de telle sorte que le quartier des Halles s'intègre à la vie des quartiers centraux et constitue un ensemble harmonieux, en particulier avec le plateau Beaubourg.
Madame la Maire, mes chers collègues, la consultation de tous se poursuit et je reste convaincue qu'il en sortira des remarques et des avis très constructifs, faisant ainsi de la réflexion sur l'avenir des Halles un véritable lieu d'avancée de la citoyenneté urbaine.
Comme maire d'arrondissement dans le cadre de ce projet, je continuerai à porter les attentes des riverains. Et comme Parisienne, j'attends de cette rénovation un signe fort qui fasse des Halles un pôle de modernité tout en assurant un environnement urbanistique rénové, ambitieux, de qualité et profondément ancré dans le XXIe siècle.
Je vous remercie.
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - Merci, Madame BERTINOTTI.
M. Jacques BOUTAULT a la parole.
M. Jacques BOUTAULT, maire du 2e arrondissement. - Madame la Maire, chers collègues, le quartier des Halles a vieilli : immeubles dégradés, conservatoire municipal à l'étroit, bibliothèque mal située, accès au R.E.R. problématique aux heures d'affluence, voirie souterraine inadaptée. Et n'oublions pas que 400 sans domicile y trouvent refuge dans des conditions peu acceptables.
Une rénovation s'impose, mais les riverains ne veulent pas subir à nouveau des années de chantier ni revivre les atermoiements et gabegies d'il y a à peine 30 ans. Quatre projets ont été retenus, aucun n'est acceptable en l'état. Le délai supplémentaire accordé à la concertation permet de préciser et compléter les préconisations à formuler aux équipes : quel centre ville voulons-nous demain ?
Le choix doit s'opérer au plus près du respect du cahier des charges. Il faut penser le vide urbain. Le jardin, seul espace vert du centre, est vital pour ceux qui vivent alentour. Il doit être préservé, notamment les espaces enfants, voire étendu. Il serait dommage d'abattre les allées de tilleuls en pleine croissance. L'expansion commerciale doit être limitée, la densification du bâti proscrite, l'accueil des 800.000 usagers du R.E.R. quotidien amélioré.
L'opportunité nous est offerte de penser l'aménagement selon des principes modernes, préparant l'avenir. Adapter le réseau ferré souterrain pour approvisionner le centre commercial par rails, utiliser des matériaux durables et faciles à entretenir qui limitent les consommations énergétiques, équiper les bâtiments en capteurs solaires, en piles photovoltaïques, recourir à la géothermie, au système de rafraîchissement autre que la climatisation, utiliser la lumière naturelle. A une ambition architecturale de pur prestige doit se substituer une opération emblématique, mobilisant les technologies actuelles pour un projet respectueux de l'environnement au service des générations futures. C'est cela qui donnera sens, attractivité et originalité au cœur de Paris.
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - Merci, Monsieur BOUTAULT.
Mme Catherine GÉGOUT a la parole.
Mme Catherine GÉGOUT. - Merci, Madame la Maire.
J'interviendrai simplement sur la mise en œuvre du vœu que nous avions adopté la dernière fois sur l'élargissement de la concertation, d'ailleurs les deux projets de délibération sont consacrés à cela.
Il est vrai que ces projets de délibération mettent en place un élargissement de la concertation aux 20 mairies d'arrondissement avec un dispositif allégé, des moyens ; donc nous l'approuvons tout à fait.
Par contre, un point n'est pas abordé : nous avions décidé également la mise en place d'ateliers urbains et d'une rencontre publique sur les éléments de la programmation ; je n'en vois pas de trace. Je voudrais savoir où en est la mise en œuvre et, surtout, avec quels moyens cela pourra être fait.
Mais surtout, surtout, je voudrais parler d'une chose qui manque et qui, pour nous, est un élément tout à fait essentiel et dont nous avions décidé le principe au dernier Conseil : l'aménagement d'une consultation allégée dans la gare d'échanges, en liaison avec la R.A.T.P. et directement accessible aux usagers de la station. Tout le monde parle de ces 800.000 personnes, mais comment peuvent-elles être consultées ?
Nous avions proposé un dispositif relativement modeste mais qui, au moins, avait le mérite d'exister. Là, il a disparu, et je ne vois pas du tout comment il peut être mis en œuvre sans moyens.
Nous avions déjà insisté sur la dimension métropolitaine qui doit être une dominante dans ce projet. D'ailleurs, M. AZIÈRE a dit des choses tout à fait pertinentes sur cet aspect et je l'en remercie.
Tout le monde parle de métropole. Je dois dire que "Les Verts" n'en parlent pas, c'est vrai. Mais, maintenant, il faut passer aux actes sur ce plan. Je vous rappelle qu'à l'initiative de Jean-Pierre CAFFET et de Pierre MANSAT, l'A.M.I.F., les maires de banlieue, les présidents de Conseils généraux ont été invités à visiter l'exposition et à en débattre ; c'était un geste symbolique. C'est modeste mais c'était un vrai symbole et on doit aller beaucoup plus loin.
D'ailleurs, je ne comprends pas bien comment il se fait que les élus régionaux ne se soient pas pour l'instant intéressés à ce dossier, alors que cela représente vraiment un enjeu extrêmement important dans la dimension métropolitaine. Donc il faudrait insister auprès du président du Conseil régional pour qu'il prenne enfin cette question en compte. C'est très important.
Les usagers de la gare, les salariés doivent impérativement être consultés. Pourquoi ne mettons nous pas en place cet outil ? Ensuite, on nous dira que ce sera trop tard. La S.E.M. n'en a-t-elle pas les moyens ? Je n'en sais rien. On se donne les moyens pour les mairies d'arrondissement, je trouve que l'on doit se donner les moyens d'appliquer ce que l'on a décidé la dernière fois.
D'ailleurs, je voudrais insister sur la Maison de la ville et de la métropole que nous proposons. C'est une évidence pour l'ensemble des acteurs de la Ville, qu'il n'y a pas de lieu où soient regroupées des activités de recherche, de connaissance, allant des activités les plus scientifiques aux activités grand public, contrairement à toutes les grandes métropoles du monde. Elles ont toutes un lieu comme cela sauf Paris !
Il est vrai que le fait urbain, métropolitain, aujourd'hui est une dimension tout à fait majeure dans notre société.
Symboliquement, et même très pratiquement, on a là vraiment le lieu idéal pour mettre en place une réalisation de cette envergure. Bien sûr, cela ne se fera qu'avec des partenaires, mais si nous ne le prévoyons pas cela ne se fera pas du tout.
Je vous remercie.
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - Merci, Catherine GÉGOUT.
Mme Florence BERTHOUT a la parole.
Mme Florence BERTHOUT. - Madame la Maire, quand nous avons délibéré le 9 décembre 2002 pour autoriser la S.E.M. Centre à engager les études préalables sur l'opération de réaménagement des Halles, nous parlions à l'époque de remise aux normes, de rénovation et de réaménagement.
Remise aux normes de la voirie souterraine et de la station Châtelet-Les Halles, rénovation des infrastructures, réaménagement du jardin.
Je dirais que, de ce point de vue, le Maire de Paris avait raison tant il est vrai que l'aménagement des Halles qui a suivi la démolition des pavillons Baltard à l'été 1971 n'a pas été, loin s'en faut, l'opération urbanistique et architecturale la plus réussie de la Capitale. Les dysfonctionnements dans la conception des lieux sont patents. Nous dénonçons depuis longtemps ces dysfonctionnements, n'en déplaise d'ailleurs au président de la S.E.M. Centre. Avec le maire du 1er nous disons depuis longtemps qu'il faut requalifier cet espace public, qu'il faut faciliter et sécuriser les accès aux transports, aux équipements, aux commerces, et qu'il faut par-dessus tout réaménager le jardin des Halles, en valoriser les atouts et en optimiser les relations avec le Forum.
Je ne reviendrai pas sur les multiples inconvénients qui ont été décrits par mes collègues de ce lieu et en particulier du jardin des Halles.
Qu'en est-il un an et demi après ? Tout se passe comme s'il fallait faire table rase du passé, y compris d'ailleurs de l'histoire la plus récente des Halles et des exigences propres de ce lieu central que les Parisiens et les riverains, je voudrais insister sur ce point, ont adopté et se sont souvent appropriés et cela, il ne faut pas l'oublier, en dépit des critiques légitimes que cela suscite.
Aucun des projets retenus au terme du concours international d'architecte qui a été lancé ne s'adapte aux Halles, quelle que soit la qualité indéniable des quatre projets.
Jean NOUVEL invente des jardins "babylonesques", une improbable piscine ; il y a surtout le bétonnage tous azimuts de l'architecture qui est un peu l'envers du décor, 62.000 mètres carrés pour 15.000 mètres carrés exigés, c'est un peu beaucoup, avouez-le.
Avec Rem KOOLHAAS, l'avant-garde est au rendez-vous. Vingt-deux tours, un canyon, un jardin qui devient une succession de tâches vertes, des commerçants qui sont mis à mal... Je ne m'étendrai pas plus avant.
Winy MAAS remplace le jardin par une immense plaque de verre de cinq mètres au-dessus du sol.
Beaucoup s'interrogent, et parmi eux les architectes les plus éminents, sur la faisabilité de ce projet.
On sait que David MANGIN a opté pour une solution plus minimaliste, mais on cherche là désespérément le second souffle.
Certains objectent, et en particulier M. SARRE qui nous a très bien expliqué quel était le cadre d'étude de définition que, précisément, il s'agit d'études de définition.
Finalement, tout cela est un peu logique. Laissons l'imagination être créative. Toutefois à ce stade, il n'y a aucune prise en compte des contraintes de l'espace, de la place des espaces souterrains, de la place du jardin, des relations avec l'environnement architectural, de l'empreinte culturelle et historique qu'il ne faut évidemment pas mettre de côté, des relations Paris/banlieue, de la place des services publics, etc.
Je voudrais profiter du maigre temps qui m'est imparti pour reposer, peut-être à un moment clé de la maturation, la véritable question de fond. La question de fond doit être, aujourd'hui plus que jamais : "Comment faire évoluer les erreurs du passé pour tenir compte précisément de ce passé et du présent ?", comme disait d'ailleurs, hier, dans un journal du soir, un architecte qui connaît bien les lieux pour y avoir travaillé à la demande d'André Malraux, dès 1967. C'est Paul CHEMETOV.
Tenir compte du passé et du présent, cela signifie en deux mots savoir que les Halles ont toujours été, sont et resteront au cœur des relations entre Paris et la banlieue, au sens large. Que cela plaise ou pas, c'est une réalité. Les Halles, c'est aussi et surtout une immense gare souterraine où transitent chaque jour 8.000 banlieusards. Trois lignes de R.E.R. s'y croisent, nous le savons tous et c'est un pôle d'attraction extraordinaire sur le plan des commerces, des services et des restaurants. Il nous faut tenir compte de cet état de fait.
Je dirai en conclusion et à ce stade, pour relayer le sentiment de la plupart des riverains et des usagers aujourd'hui, que ce n'est pas aux Halles de s'adapter au projet, comme nous en avons le sentiment, mais c'est bel et bien au projet de s'adapter aux Halles.
Ce débat doit être l'occasion de rappeler solennellement les préoccupations majeures de ces usagers et de ces riverains. Je voudrais redire, comme l'a dit le maire du 1er arrondissement, que nous souhaitons qu'il ne soit pas touché à la surface du jardin, que l'on n'augmente pas les surfaces du bâti et que l'on ne fasse pas revivre aux Parisiennes et aux Parisiens, en particulier aux riverains, les traumatismes de travaux sans fin.
Nous attendons, au-delà de consultations, vous l'avez bien compris, du sens et un grand souffle.
Merci.
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - J'espère que vous attendez des évolutions également parce que s'il ne faut pas faire de bruit, ne rien toucher, etc., cela va être difficile.
Monsieur Patrick BLOCHE, vous avez la parole.
M. Patrick BLOCHE. - Merci, Madame la Maire.
Effectivement, ne rien faire, ne rien choisir, c'est toujours la solution la plus facile.
En l'occurrence, je voudrais très rapidement, parce que le temps imparti au groupe socialiste doit aller vers son épuisement, dire deux ou trois choses que le groupe socialiste et radical de gauche ressent sur ce dossier des Halles, à un moment bien déterminé qui a été rappelé par les différents intervenants et qui ne doit surtout pas nous conduire, à travers ce débat, à conclure bien sûr nos échanges sur ce sujet et sur ce projet d'aménagement ô combien important pour Paris.
Le groupe socialiste et radical de gauche a souhaité se réunir tout spécialement pour débattre et échanger sur ce projet. Il n'a pas eu le sentiment dans cette affaire d'avoir été pris de court ou d'avoir été débordé, comme les autres élus du Conseil de Paris, par l'engouement et la passion que les Parisiens et d'autres d'ailleurs, éprouvent à l'égard du projet de réaménagement du cœur de Paris.
Je dirai pour faire court que cette vitalité démocratique est un élément tout à fait réjouissant. Cet intérêt des Parisiens, des Franciliens et, plus largement, de nos concitoyens pour ce projet de réaménagement traduit bien ce qui se passe dans cette ville depuis trois ans. Je pense que nous avons su, et je fais référence plus explicitement à la majorité municipale, créer les conditions du débat, de l'échange, de la consultation, et entraîner ainsi nos compatriotes.
J'évoquerai trois préoccupations, très brièvement.
Il ne faut pas oublier, bien entendu, que les Halles, et cela a été dit, sont un nœud de communication central. C'est l'entrée dans Paris pour la Région et bien au-delà. Il y a, en l'occurrence, un impératif de sécurité que nous devons porter car il est de notre responsabilité d'élus, bien sûr, d'assurer la sécurité de tous les voyageurs qui entrent dans Paris ou qui en sortent par les Halles.
Ce premier point, ce premier argument, nous oblige à agir. Nous ne pouvons pas ne rien faire.
Deuxième élément important, nous voulons une ville active et en l'occurrence le dynamisme du centre commercial, les activités commerciales qui sont aux Halles constituent un élément très important de l'activité et de l'emploi à Paris.
Il faut donc préserver ce dynamisme car en matière d'activité ils sont longs à créer. Ils se créent sur la durée, ils peuvent se briser très rapidement. Il ne s'agit pas pour nous d'exprimer un souhait d'extension de ces activités commerciales, mais nous tenons beaucoup à maintenir ce dynamisme qui existe actuellement.
Puis, troisième point, c'est ce projet architectural, cette envie, ce besoin que nous avons de marquer notre ville, quelque part, de notre empreinte, sans être trop ambitieux ou trop prétentieux. Il s'agit de profiter de ce projet de réaménagement du cœur de Paris pour dire ce que peut être l'architecture dans notre pays en ces débuts du XXIe siècle.
Cela dit, si nous essayons d'avoir collectivement une démarche que je qualifierais d'esthétique à l'égard des Halles, méfions-nous du goût du jour ou de l'effet de mode. Nous travaillons sur le long terme et nous aménageons pour plusieurs décennies. Je dis cela parce qu'en fonction des critères esthétiques qui sont ceux d'aujourd'hui, un projet se détache. Il est souvent cité. Je ne veux pas l'écarter, bien au contraire, car c'est sans doute l'un des plus intéressants, mais je ne souhaiterais pas que nous nous précipitions.
En l'occurrence et pour conclure, je pense qu'il faut impérativement que nous privilégiions d'abord, à ce stade, le choix d'un projet qui a pris en compte tout ce qui a pu être rappelé encore ce matin et qu'ensuite la Commission d'appel d'offres fasse le choix de l'équipe. Il ne doit pas précéder le choix du projet et notre capacité à dire tout ce que nous voulons mettre aux Halles.
A partir de ce que nous diront les Parisiens, Alain LE GARREC rappelait les chiffres, 75.000 visiteurs, 8.000 bulletins d'expression, 100.000 connexions Internet, à partir de la restitution publique et connue de tous, et le groupe socialiste et radical de gauche y est très attaché, de cette consultation, il faudra prendre en compte un certain nombre d'éléments.
J'ajouterai peut-être une préoccupation, celle d'en faire un pôle culturel important et peut-être de travailler, je ne sais, encore faut-il en voir naturellement le besoin , sur l'idée d'un auditorium à Paris, puisque vous savez que les fondations de cet auditorium existent.
Je ne veux pas en l'occurrence dire qu'il faut obligatoirement un auditorium à cet endroit, mais après tout comme c'est un projet qui est un peu un serpent de mer, et bien entendu en associant pleinement Région et Etat ! débattons de l'auditorium aux Halles.
Chers collègues, et je termine ce qui n'est pas une conclusion à ce débat, je crois que la seule chose que l'on pourrait plus tard nous reprocher, c'est de ne pas avoir eu d'imagination.
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - Merci, Patrick BLOCHE.
La parole est à Jean-François BLET.
M. Jean-François BLET. - Oui, mon cher Patrick, je voulais vous rassurer, je suis ni surpris ni débordé par ce débat. Bien au contraire, je m'en réjouis.
Alors, que faire des Halles ?
Je ne vous dirai pas "vive Truc !" ou "vive Machin !". Réduire le débat d'idées à quelques images, c'est ravaler l'urbanisme à un débat de café du Commerce.
Que faire des Halles ?
Depuis la remise des études, c'est l'embarras. La radicalité des projets, leur caractère spectaculaire ou aguicheur, selon les goûts, a suscité l'engouement. Ce qui ne devait être qu'une simple opération d'embellissement d'un trou moche au centre de Paris est ainsi devenue un sujet d'intérêt quasi planétaire. Le trou des Halles est devenu le trou le plus célèbre du monde après les Twin Towers.
Perplexe face aux projets des grands architectes convoqués, décontenancé par l'importance de l'enjeu, le Maire a sagement décidé de donner le temps de la réflexion. Tout Paris est dorénavant invité à se pencher sur son trou.
Or, l'avenir du trou se joue maintenant. C'est en effet ces jours-ci, si ce n'est déjà fait, que de nouvelles préconisations ou précisions doivent être données aux équipes et les propositions que nous vous faisons devraient leur être communiquées, sinon ce débat n'aurait pas de sens.
Qu'est-il souhaitable pour le quartier des Halles ?
D'abord, de ne pas se tromper d'échelle. Il ne faut pas réaménager les Halles pour la planète en réalisant un projet digne d'une exposition universelle, projet éphémère comme vous le savez, mais pour les Parisiens et les Franciliens avec un projet plus modeste adapté aux problèmes du quartier. Le quartier ne doit pas seulement être plus beau, il doit être plus utile en s'inscrivant directement dans une logique de développement durable. Ce doit être un projet pour le 3e Millénaire.
Aussi, "Les Verts" proposent-ils de réaliser un véritable centre de Paris écologique, un cœur vert au centre de Paris.
Comment y parvenir ?
1. En ne densifiant pas. Ne pas bâtir sur le jardin. Ne pas creuser davantage le "trou". Arrêter la densification commerciale, sauf pour les commerces de proximité qui font défaut dans ce quartier.
2. En créant un jardin d'un seul tenant pour intégrer les Halles dans l'espace urbain.
Un véritable jardin avec de grandes pelouses accessibles et de nouvelles liaisons avec la gare R.E.R. pour notamment ces problèmes d'entrées et d'évacuations.
3. En créant un ensemble paysager et architectural de qualité.
Pour les éléments bâtis, une opportunité est offerte de réaliser une création architecturale innovante, audacieuse, moderne, de dimension humaine et de faible densité. C'est un pari qu'il faut réussir.
Sans obérer la qualité du jardin qui sera le lieu de rencontres et de détente des Parisiens, des Franciliens et des visiteurs du monde entier. Le volet paysager devra ainsi être particulièrement approfondi, c'est l'une des lacunes du projet ; il faut recourir à des paysagistes de renom, éventuellement ouvrir un concours sur ce problème international bien sûr.
4. En décidant la création d'un pôle de fret intermodal rail-route, pour que Paris soit la première des capitales à réduire drastiquement la pollution et l'effet de serre.
Une étude doit envisager la liaison entre réseau ferré et voie souterraine routière, elle est indispensable avant d'aller au-delà.
5. En créant un pôle exemplaire d'énergies renouvelables pour viser à l'autosuffisance énergétique, cela doit être notre horizon dorénavant, et diminuer les nuisances générées par la centrale de climatisation. Une étude des potentialités d'utilisation des énergies renouvelables devra être réalisée et les constructions neuves devront être réalisées selon une démarche H.Q.E. ciblée énergies renouvelables.
Alors pour conclure, Monsieur le Maire, que faire ?
Eh bien, ma foi, prenons notre temps. Si les projets actuels ne sont pas satisfaisants, il est très simple de déclarer infructueux l'appel d'offre et de déclarer infructueux les résultats de ce marché de définition. Et il est possible à partir de là de rouvrir sur les véritables enjeux. Si l'on veut un pôle de fret, effectuons cette étude d'abord pour évaluer sa faisabilité. Si l'on veut créer un pôle d'énergies renouvelables, faisons-le. Si nous voulons un jardin superbe et d'un seul tenant, faisons un concours de paysagistes et faisons également un concours d'architectes internationaux. Mais pas un concours réduit à 3 ou 4 personnes, là a été l'erreur initiale, un concours qui soit ouvert aux plus grands architectes de la planète et à tous les jeunes créateurs internationaux. Prenons le temps de faire cela, et à ce moment-là les Halles seront un véritable succès.
Donnons un cœur vert à Paris, un cœur durable et beau. L'audace et l'innovation doivent être au service des Parisiens, des Franciliens, et de la terre entière s'il le faut.
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - Merci, Monsieur BLET.
Et pourquoi pas de l'univers !
La parole est donnée à Laurence DOUVIN.
Mme Laurence DOUVIN. - Merci, Madame la Maire.
Elargir la concertation sur le projet des Halles à tous les arrondissements, c'est une évidence.
Le cœur de Paris qui voit passer chaque jour 800.000 personnes ne s'appartient pas. Je suis une élue du 17e, je n'ai pas besoin d'être une élue du Centre de Paris pour me sentir concernée.
Cependant, je dois dire que j'ai dû mal à voir où cette concertation supplémentaire, dont le coût est quand même de 147.000 euros, va nous mener. En effet, il nous est proposé, il vous est proposé un choix entre 4 projets, certes créatifs, mais techniquement et financièrement irréalisables.
Alors, par obligation, la S.E.M. tient secret le coût de réalisation des projets, mais nous savons bien qu'il s'agit de plusieurs centaines de millions d'euros, une somme qui correspond à la création de bien des équipements de proximité et de logements, il ne faut donc pas se tromper.
Or, depuis le début du projet, j'ai noté que l'on est passé de la notion de rénovation à celle de réaménagement ; ce qui signifie une action d'une toute ampleur qu'initialement.
J'y lis qu'il est question d'écrire un chapitre nouveau de l'histoire des Halles. Tout un programme !
Mais ce projet, c'est un projet pour qui ? Qui fréquente les Halles ? Les Parisiens bien sûr, mais encore beaucoup plus les banlieusards. Or que demandent-ils ? Essentiellement une nouvelle gare, un jardin plus vaste, un centre commercial mieux aménagé.
Or jusqu'ici la concertation n'a pas permis de faire émerger l'un des projets. J'en prendrai pour exemple l'opinion des associations de riverains figurant sur le site.
Le projet de KOOLHAAS est présenté comme un assortiment de flacons de parfums avec un nombre et une hauteur de pyramide pénalisant pour l'environnement.
Celui de Winy MAAS est décrit comme un podium de rêve à voir du ciel - mais qui le pourra ? - et entraînant la perte de nombreuses perspectives.
Celui de Jean NOUVEL est qualifié de mastodonte, trop bâti, trop dense, avec un look de ville nouvelle. Je ne suis pas sûr qu'il s'agisse là d'un compliment.
Et celui de MANGIN est décrit comme un couvercle géant de cuivre de verre, manquant de souffle et n'apportant rien à la situation actuelle.
Telle est bien la preuve qu'à ce stade aucun projet n'est abouti.
Si les maquettes et les affiches, telles qu'elles sont présentées au Forum des Halles, peuvent faire rêver, il est des rêves dont à un moment donné il faut sortir au profit d'une réalité qui corresponde aux besoins de ceux qui fréquentent le site. Mais pour cela, il aurait fallu soumettre aux concepteurs un cahier des charges qui réponde aux choix décisifs nécessaires. Tel n'a pas été le cas, et le blocage du processus que nous sentons aujourd'hui en porte le poids.
J'aimerais savoir à quoi la concertation menée jusqu'ici et celle que vous vous proposez de développer aujourd'hui va servir, puisque c'est bien dans l'isolement d'une salle close que la Commission d'appel d'offres prendra sa décision.
Alors, tout en appréciant le débat d'aujourd'hui, je regrette vivement que vous ne permettiez pas aux élus parisiens que nous sommes d'effectuer un vote sur le fond. Un geste qui permettrait un véritable choix à la mesure de l'enjeu.
Je vous remercie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes U.M.P. et Union pour la démocratie française).
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - Deux derniers orateurs : M. Yves CONTASSOT, puis M. Denis BAUPIN.
M. Yves CONTASSOT, adjoint. - Merci.
Comme il a été dit, aucun projet n'est en l'état acceptable.
Alors, je crois que nous sommes nombreux à dire qu'il faut tenter de les améliorer. Cela étant, l'écart est tout à fait considérable entre les attentes exprimées sur ces bancs de manière très large ou par l'ensemble des usagers du site et l'état des projets. En même temps, nous sommes dans le cadre juridique relativement contraignant du marché de définition où nous ne pourrons pas faire absolument ce que nous voulons.
Alors tout à l'heure, Bertrand DELANOË disait : "Il faut avoir le courage de prendre des décisions".
Je souhaite qu'on n'exclue aucune décision, y compris non pas l'infructuosité mais, en tout cas, la déclaration sans suite. Car, en la matière, un des écueils à éviter serait de dire que, malgré des projets insatisfaisants, nous en choisissions quand même un au motif qu'il serait le moins mauvais.
Je crois que dans cette question, au départ, sans doute, une étape a été omise, c'est celle de définir un projet d'urbanisme pour Paris et non pas seulement un simple projet d'architecture. Veut-on un centre commercial pour Paris au détriment d'autres centres commerciaux, notamment en banlieue ? Veut-on faire en sorte que l'ensemble des moyens de transport en commun convergent vers un point central unique dans Paris ? Ou veut-on une ville et une métropole poly-centrée avec davantage de lieux d'arrivée et de coordinations ? Veut-on, oui ou non, avoir un jardin qui n'a rien de sinistré, je récuse ce terme, mais qui doit être simplement aménagé, réaménagé de manière plutôt marginale, dirais-je, que revisitée de fond en comble ? Veut-on, oui ou non, faire en sorte que ces voiries souterraines soient supprimées définitivement en tant que voirie et servent à d'autres finalités ? Ce sont des choix urbanistiques et pas simplement architecturaux qui ne figurent pas dans le cahier des charges dont l'une des équipes, d'ailleurs, souligne à l'envi les contradictions.
C'est sur ces bases-là, sans doute, qu'il faudrait que nous puissions davantage faire des choix pour dire dans quelle mesure nous voulons un projet qui convienne à l'ensemble des usagers, qui ont d'ailleurs des intérêts totalement contradictoires à propos de ce centre, qu'il s'agisse des usagers de la semaine, des usagers du week-end, qui ne sont pas les mêmes, des riverains et des salariés.
Un autre point tout à fait fondamental, c'est l'absence totale de contrainte sur le plan énergétique. Aucune étude énergétique n'est envisagée, aucune étude énergétique n'est imposée à l'ensemble des répondants. Or, certains projets conduiraient à l'évidence à une augmentation considérable de la capacité nécessaire en matière de fourniture, à fois de chauffage et de froid, et donc à des conséquences sur la centrale des Halles, ce que nous ne pouvons admettre en l'état.
J'ai confiance dans la capacité de l'Exécutif de n'exclure aucune hypothèse, y compris celle-ci. Je souhaite que cela fasse partie de notre réflexion et que, en la matière, nous n'ayons pas peur de dire : "Reprenons le travail sur d'autres bases, si cela est nécessaire, pour ne pas recommencer les erreurs commises il y a trente ans".
(Applaudissements sur les bancs des groupes "Les Verts", socialiste et radical de gauche, du Mouvement républicain et citoyen et communiste).
Mme Anne HIDALGO, première adjointe, présidente. - Merci, Yves CONTASSOT.
Dernier orateur, Denis BAUPIN.
M. Denis BAUPIN, adjoint. - Oui, merci, Madame la Maire.
L'analyse des commentateurs depuis plusieurs mois sur ce projet, comme l'a dit Yves CONTASSOT à l'instant, a surtout porté sur l'aspect architectural du projet. Certes, c'est important, mais ce n'est que la partie émergée des problèmes posés. Je crois que l'on peut dire, de fait, que les Halles ont besoin de bien plus qu'un projet architectural, mais d'un véritable projet urbanistique.
Or, beaucoup des enjeux de ce projet concernent la partie immergée, notamment les enjeux de déplacements. A commencer par le pôle de transport, gigantesque gare d'échanges régionale au cœur de la Capitale.
Les projets qui nous ont été présentés méritent encore largement d'être clarifiés en ce qui concerne l'accessibilité de la gare, la lisibilité des cheminements et, surtout, la sécurité. Je suis pour ma part extrêmement réservé sur les cheminements complexes au travers du centre commercial imposé par certaines équipes aux voyageurs. Par contre, je pense qu'il faut regarder de façon très attentive tout ce qui favorise l'accès direct des usagers depuis le jardin et par une entrée nouvelle depuis la rue de Rivoli.
(M. le Maire de Paris reprend place au fauteuil de la présidence).
En sous-sol, il y a aussi la voirie souterraine. Là encore, le travail mérite d'être approfondi afin de limiter au maximum le transit automobile dans le cadre du plan de déplacement de Paris, et notamment du plan en cours d'élaboration sur le centre de Paris, de façon à ne maintenir dans le sous-sol que les fonctions indispensables liées au parking, aux autocars et aux livraisons.
Le fret, c'est le troisième volet déplacement de ce dossier. Peu d'équipes ont travaillé ce sujet pourtant essentiel au regard de la politique municipale. Nous souhaitons que les marchandises nécessaires au centre commercial, mais aussi progressivement les marchandises nécessaires à la zone piétonne soient acheminées en sous-sol et ce, à court terme. Et au plus vite que soit étudiée la possibilité d'acheminer ces mêmes marchandises par le rail jusqu'au cœur de Paris via les voies du R.E.R. La R.A.T.P., comme l'a rappelé Alain LE GARREC tout à l'heure, a déjà donné son accord pour une telle étude.
Enfin, ce projet doit aussi être l'occasion d'étendre la zone piétonne. Ce sera notamment possible par la fermeture de certaines des trémies d'accès à la voirie souterraine. Mais c'est aussi possible en transformant de nouvelles voies à proximité du quartier en voies à priorité piétonne, et en sécurisant les traversées piétonnes des grands boulevards longeant ce quartier, à commencer par le boulevard Sébastopol en liaison avec le quartier Beaubourg.
Ces quatre enjeux liés à la politique de déplacement sont cruciaux. C'est en ce sens que nous souhaitons voir évoluer les projets proposés par les équipes. Prendre en compte ces enjeux, c'est indispensable pour la rénovation des Halles, pour que cette rénovation soit une réussite pour le quartier, pour Paris et pour la Région Ile-de-France.
Merci.
M. LE MAIRE DE PARIS. - Très bien. Nous allons maintenant écouter, non pas l'architecte en chef du projet parce que, sinon, c'est imprudent, mais le coordonnateur de notre créativité, Jean-Pierre CAFFET.
M. Jean-Pierre CAFFET, adjoint, rapporteur. - Merci, Monsieur le Maire.
Je n'ai pas la prétention d'être l'architecte en chef des Halles. D'ailleurs, je crois que ce terme est plutôt de mauvais aloi et n'est pas un gage de réussite.
Pour commencer, je crois que nous avons eu un débat riche, un débat utile et dans une ambiance particulièrement apaisée et sereine. Personnellement, je m'en félicite et je me tourne alternativement à droite et à gauche.
Avant de tirer des conclusions provisoires, et vous comprendrez bien, un peu personnelles de cette discussion, je voudrais revenir de manière assez rapide sur un certain nombre de réactions que j'ai entendues, qui ressemblent un peu, me semble-t-il, à des procès d'intention, dont je voudrais faire justice. J'ai entendu des expressions comme "précipitation", "volonté d'agir coûte que coûte", "fait du prince", "dissimulation", "cahier des charges non adéquat", etc. Je veux donc revenir sur quelques éléments du passé et quelques éléments de méthode.
La réflexion sur les Halles, d'abord, est ancienne. Et notre réflexion sur le dysfonctionnement des Halles, nous ne l'avons pas commencée la semaine dernière. Nous l'avons engagée au tout début de la mandature, avec un travail extrêmement important qui a été fait par les services de la Ville, par la S.E.M. Paris-Centre, en lien avec les divers occupants du site, pour essayer d'établir un constat qui soit un constat commun à nous tous. Ce constat a été fait et il a servi de base à la définition des objectifs que la Municipalité entendait poursuivre.
Quelques éléments de constat, sans être trop long. Les problèmes de sécurité, notamment dans la salle d'échanges de la R.A.T.P., ont été soulignés par un certain nombre d'orateurs, et je considère que c'est l'un des points fondamentaux que nous devons traiter, et de la manière la plus rapide possible.
Autre élément de diagnostic : le vieillissement prématuré des structures, leur dégradation, les coûts de maintenances élevés, les problèmes de sécurité, y compris, de ces pavillons qui nous obligent à l'action et, là encore, à une action rapide. Je citerai aussi les dysfonctionnements d'usage, je crois que tout le monde en est relativement convenu : le morcellement du jardin, les déséquilibres des flux piéton, la circulation anarchique, la fonctionnalité médiocre du Forum des Halles, la faible évolutivité des bâtiments qui existent en surface. Enfin, un dernier élément, concernant l'avenir des voiries souterraines.
Je crois que nous sommes tous tombés d'accord sur ces éléments et que ce diagnostic a été largement partagé par tout le monde. C'est sur ce diagnostic que nous avons fondé et que nous avons voté à l'unanimité, en Conseil de Paris, au mois de décembre 2002, un projet de délibération définissant des objectifs, des modalités de la concertation et une méthode, cette méthode étant celle des marchés de définition, que personne n'a remise en cause aujourd'hui, même si j'entends à présent un certain nombre de critiques, notamment sur les limites de cette procédure.
Par ailleurs, compte tenu d'un certain nombre de réactions ou de critiques que j'ai entendues concernant le cahier des charges, je veux préciser que ce cahier des charges a été validé par un comité de pilotage qui réunit notamment presque la moitié de l'Exécutif, les maires des quatre premiers arrondissements, et que nous en avons largement discuté. Ce cahier des charges, nous étions d'accord pour l'envoyer aux quatre équipes, tel qu'il avait été discuté et défini entre nous.
Nous sommes aujourd'hui dans une situation où nous avons un rendu de ces quatre équipes, quatre propositions, quatre démarches de réaménagement des Halles, car il s'agit d'une opération de réaménagement. Nous l'avons dit dès le début, ce n'est pas une opération de rénovation cosmétique, un coup de peinture sur les Halles compte tenu des dysfonctionnements que nous avons identifié, mais bien une opération de réaménagement, qui peut être plus ou moins ambitieuse, évidemment. C'était d'ailleurs ce qui était affirmé dans notre délibération du mois de décembre 2002.
Nous avons donc quatre projets différents les uns des autres, avec chacun leur créativité, leurs avantages, leurs inconvénients, leurs limites. A l'issue de ce que j'ai entendu, j'ai envie de dire aujourd'hui que ces quatre projets sont beaucoup plus riches, beaucoup plus utiles, beaucoup plus travaillés en profondeur que ce que montrent les maquettes qui sont exposées. Et très honnêtement, à entendre un certain nombre de réactions, j'ai un peu le sentiment que l'on s'intéresse beaucoup plus à l'écume, à la couleur, aux formes qu'au travail en profondeur qui a été fourni par ces quatre équipes et qui, je crois, nous permet aujourd'hui d'avancer de manière significative dans l'affinement et la définition de ce que nous voulons faire sur ce quartier des Halles. Bien sûr, les médias s'emparent d'images, c'est normal, les esprits s'échauffent en voyant des formes architecturales parfois considérées comme peut-être un peu trop novatrices pour ce quartier ; c'est un véritable débat de marier la tradition, le caractère historique de ce quartier et la modernité qui pourrait lui être donnée. Mais encore une fois, le travail qui a été fourni est un travail de fond, et sur un certain nombre d'aspects qui ont été évoqués ce matin, des solutions sont apportées. A nous de les affiner, de les retravailler, de préciser ce que nous voulons, c'est le sens de ce débat au Conseil de Paris, de manière à ce que nous puissions renvoyer une série de questions aux quatre équipes, pour qu'ils nous répondent notamment sur l'évolutivité de leurs propositions et la manière dont ils pourraient prendre en compte ce qui s'exprime aujourd'hui et ce qui s'exprime dans la concertation, la plus large possible, que la Ville a voulue et que nous entendons continuer dans les mairies d'arrondissement et dans la salle d'échanges. Par ailleurs, en réponse à ce que disait Mme Catherine GÉGOUT, un certain nombre d'initiatives ont d'ores et déjà été prises auprès des élus régionaux représentés au Comité de pilotage, et des maires des communes de la Région. S'ils veulent s'exprimer, ce sera véritablement un plus et si cela peu enrichir ce que nous allons demander maintenant aux équipes, j'y suis tout à fait disposé.
Ceci étant dit, il faut bien comprendre ce qu'est un marché de définition. Nous avons procédé ainsi sur les territoires du Nord-Est, 200 hectares à aménager, ou encore sur les terrains des Batignolles, 40 hectares. Ce que nous choisissons fondamentalement n'est pas une image fixe, telle que nous pouvons voir sur les maquettes des Halles. Imaginer aujourd'hui, ou vouloir faire croire que ce que nous verrons demain aux Halles (quand je dis demain, c'est dans 10 ans, plus, peut-être) sera le fac-similé de l'une des maquettes qui est exposée, est une ineptie, une aberration. Ce que nous voulons faire aujourd'hui, et c'est encore une fois le cadre d'un marché de définition, c'est choisir une démarche, un état d'esprit et des principes urbanistiques. Et je récuse la critique selon laquelle on s'est beaucoup occupé d'architecture, et on ne s'est pas occupé de principes urbanistiques. C'est faux. Quand on regarde les projets en profondeur, il y a là des principes urbanistiques peut-être différents, mais qui sont affirmés et sur lesquels nous avons à trancher et à choisir, c'est principalement la raison de ce débat.
Il y a un certain nombre de questions qui ont été posées aujourd'hui, de remarques, de suggestions, de propositions, qui constituent le cœur de notre réflexion future et des questions que nous devons poser aux équipes.
Personnellement, j'en ai retenu six. Elles ne sont pas hiérarchisées, je les ai notées au fur et à mesure que j'ai écouté les différents orateurs, mais pour moi les six questions fondamentales qui nous sont posées sont les suivantes :
Premièrement, la densité. Faut-il des surfaces supplémentaires ? N'en faut-il pas ? S'il en faut, dans quelles proportions ? Et pour quelles affectations ?
Deuxième sujet : un équipement public à la dimension du site. J'ai beaucoup entendu de remarques à ce sujet. Je crois que la réflexion sur un équipement à la dimension de ce site, c'est-à-dire au moins une dimension régionale, qui pourrait être voué à des affectations qui restent à définir, j'ai entendu parler de l'Europe, de la recherche, de culture, est quelque chose d'extrêmement important et qu'il nous faut travailler. Mais on comprendra qu'on ne peut pas dire aujourd'hui qu'il ne faudra pas un mètre carré supplémentaire, notamment pas en surface, et demander en même temps (à moins de l'enterrer sous le jardin) un équipement public à la dimension de ce site, donc n'ayons pas peur de le dire, un équipement de plusieurs milliers de mètres carrés. Donc vous voyez, dès que l'on rentre un peu dans le détail, les choses deviennent plus compliquées. Il ne suffit pas d'avoir des affirmations de principe. Reconnaissons que le sujet est un peu plus complexe et qu'avancer des propositions contradictoires ne fait pas avancer les choses. Donc densité, problème d'équipement public.
Troisième sujet : le jardin, le traitement du jardin, son unité.
Jusqu'où cela doit aller par rapport au morcellement actuel ? La question porte également sur la préservation d'un certain nombre d'éléments de ce jardin. Pourquoi pas ? J'ai entendu dire qu'il ne fallait pas couper les tilleuls qui ont poussé depuis vingt ans. Cela ne me paraît pas une réflexion absurde, mais ne pourrait-on pas intégrer ces arbres dans un jardin qui aille au-delà du morcellement actuel ? C'est une question intéressante.
Quatrième question fondamentale : la liaison entre la surface et le sous-sol. Les équipes ont des propositions différentes, sur lesquelles il faut que nous avancions. Cela rejoint les questions qu'a posées Denis BAUPIN tout à l'heure. Travaillons sur ces questions de liaisons et regardons comment les organiser. Elles seules peuvent répondre aux impératifs de sécurité que nous devons mettre en œuvre, car si un jour il y a un problème dans la salle d'échanges, et je ne le souhaite pas, il pourrait y avoir des dégâts et des dégâts humains particulièrement importants.
Cinquième sujet de réflexion : les circulations et les rapports entre les voiries souterraines et les voiries de surface. Là aussi, ce sont les questions qu'a posées Denis BAUPIN. Faut-il les fermer toutes ? Faut-il les fermer en partie ? J'entends M. LEGARET dire qu'il est partisan de les fermer en totalité. Pourquoi pas ? J'entends également dire qu'il faut fermer un certain nombre de trémies, qui très franchement, sur le plan urbain, n'ont pas été une réussite. Pourquoi pas ? Travaillons ces questions.
Enfin, sixième question : celle de nouveaux bâtiments novateurs sur le plan architectural. Pourquoi l'équipement public dont il est question et qui visiblement est souhaité par une large partie de notre Assemblée ne serait-il pas l'occasion de cette nouveauté architecturale ? J'ai vu des projets, certains bâtiments proposés sur ce périmètre méritent de l'attention.
Avec ces six questions, je ne prétends pas à l'exhaustivité, j'en ai peut-être oublié. Mais je crois qu'avec ces six questions, nous avons le socle qui nous permet de progresser, de requestionner les équipes, sachant bien que ce qui nous sera répondu et les amodiations qui seront apportées à ce que nous ont fourni les équipes dans le rendu de deuxième phase, ne constituent bien évidemment pas l'aboutissement définitif de ce que la Ville, la Municipalité, fera sur les Halles.
Ce que je souhaite, ce n'est pas, comme j'ai pu l'entendre dire, la "déclaration d'un infructueux" ou la "déclaration sans suite", mais que nous prenions le temps de pouvoir encore travailler, de nous donner des semaines complémentaires, de nous donner des mois complémentaires s'il le faut, de manière à pouvoir trancher avant la fin de l'année. Nous devons faire en sorte que la Commission d'appel d'offres - je vous rappelle que, juridiquement, c'est elle qui attribuera le marché - soit la mieux informée possible non seulement des faisabilités techniques et des coûts, puisqu'il en a été question ce matin, mais de tout ce qui est remonté de la concertation et de la discussion avec les habitants non seulement dans le quartier, mais sur l'ensemble de Paris. La C.A.O. doit pouvoir prendre sa décision avec le maximum d'informations possibles, y compris les aspirations, les suggestions et les préoccupations des Parisiens et, au-delà des Parisiens, de tous ceux qui s'intéressent à ce projet.
Et, pour terminer, je dirai que je suis tout à fait d'accord avec M. LEGARET et que le meilleur choix n'est probablement pas de ne pas choisir.
(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et radical de gauche, du Mouvement républicain et citoyen, communiste et "Les Verts").
M. LE MAIRE DE PARIS. - Chers collègues, je voudrais d'abord remercier très sincèrement tous les intervenants. Je les remercie parce que toutes ces interventions, y compris quand on n'est pas d'accord avec tel ou tel point, sont utiles. Je voudrais aussi exprimer un accord vraiment total avec l'état d'esprit de Jean-Pierre CAFFET. Je voudrais y ajouter une remarque : vous voyez que l'on avance. Il y a quelques semaines, ou même ce matin, je disais que le débat commence à clarifier les choses. Il nous est utile. Il nous met en difficulté mais c'est sain, c'est intéressant. Eh bien là, maintenant, je pense que nous avons avancé depuis 9 heures du matin.
Si l'on ajoute les remarques faites dans cette séance à tout ce que nous ont dit les Parisiens, à tous les débats que l'on suit dans la presse avec des points d'accord, de désaccord... Tout à l'heure quelqu'un faisait allusion à l'interview de l'architecte (un grand architecte d'ailleurs qui travaille souvent pour la Ville) dans Le Monde, hier : il y a des aspects sur lesquels j'étais d'accord, sur d'autres je ne l'étais pas. Tout cela, chers amis, nous fait avancer.
Comme le suggère Jean-Pierre CAFFET, donnons-nous encore les semaines, voire les mois qui nous permettent de mieux comprendre, qui nous permettent d'absorber encore de l'analyse et des avis. N'oublions jamais, comme l'a fait Jean-Pierre à travers 6 questions non exhaustives, l'objectif.
D'ailleurs, tu as été bref, car tu aurais pu rappeler aussi toutes les réunions qui ont eu lieu avant même le marché de définition avec les habitants, avec les élus locaux, avec les associations.
On n'est pas parti de rien quand on a commencé à lancer l'appel de définition, le marché de définition. Moi-même j'ai participé à un certain nombre de ces réunions et il y a eu beaucoup d'échanges. Continuons ! Vous verrez que nous sommes plus intelligents aujourd'hui qu'il y a 3 mois, et que nous serons plus intelligents dans 2 mois. Oui, oui ! C'est cela l'urbanisme qui se donne les moyens d'entendre.
Oui, mais vous n'auriez pas dû me taquiner là-dessus parce que si on avait fait comme cela pour l'aménagement des Halles il y a quelque temps, on ne vous aurait peut-être pas corrigé aujourd'hui.
Alors, justement, on va continuer à essayer d'être plus intelligents parce que plus nombreux à apporter des idées, à repérer des difficultés et à chercher les solutions.
Ensuite, et là, je suis d'accord avec Jean-Pierre CAFFET et M. LEGARET et d'autres orateurs : il faudra bien choisir. Mais n'oublions pas une chose, c'est que la démarche que nous suivons aujourd'hui est une démarche qui pèse aussi sur les 4 équipes, lesqelles ne sont pas autistes j'imagine. Elles s'aperçoivent qu'il y a des débats, elles discutent avec les associations, elles entendent les élus. Très bien ! Tout cela aussi va faire de la créativité.
Et le jour où la C.A.O. choisira un projet, croyez-vous que le travail sera fini ? Quand elle choisira un projet, elle choisira - comme l'a dit Jean-Pierre CAFFET - une démarche. Et dans cette démarche il nous appartiendra, à partir de ce vaste débat, de fixer un certain nombre de règles, de demandes, d'exigences, de partis pris. Il ne suffira pas de choisir une équipe. Cette équipe aura à retravailler, à réinventer à partir d'un parti pris de départ.
Voilà, chers amis. J'aime que nous exercions notre mandat de cette manière. Je vous le dis vraiment tel que je le ressens sincèrement : il me semble que nous sommes affrontés à une question extraordinairement passionnante. Tant pis si on y passe un peu de temps et que parfois cela nous perturbe. Pas tant pis mais tant mieux ! Tant mieux car plus nous nous perturberons, plus nous nous mettrons en situation d'exigence et de créativité et meilleures seront nos décisions, et surtout meilleurs seront les résultats.
Je crois vraiment que sur ce sujet totalement vital pour Paris, pour sa Région et au-delà, il ne faut sûrement pas renoncer à l'ambition. Sans ambition, on ne ferait rien de bien. Il ne faut pas renoncer à l'esprit de gestion, au management, à la manière de gérer la perspective en matière de livraison d'équipements, d'activités économiques et d'une manière de vivre le centre de Paris.
Troisièmement, je crois effectivement qu'il faut tous faire preuve de sagesse, de prudence. Pas besoin de rouler des mécaniques sur ce dossier. Mais si nous savions trouver les moyens justement de la prudence et, en même temps, avoir beaucoup d'ambition, il se peut que tous autant que nous sommes ici nous soyons en train de faire une œuvre pour Paris qui n'a pas beaucoup de rapport avec les noms que nous portons. Et ça, c'est vite oublié.
En revanche, ce que nous faisons a un rapport au temps qui n'est pas médiocre. Et donc, je me réjouis vraiment que tout le monde l'aborde avec autant de sérieux, d'ambition, d'imagination, et en même temps de rigueur.
Nous en reparlerons de toute façon au Conseil de Paris. Ce sont des débats que nous aurons de nouveau et au fur et à mesure de l'évolution de ce dossier tout à fait majeur pour nos concitoyens et notre Ville.
Donc je vous remercie. Je remercie les Parisiens qui s'expriment, qui vont s'exprimer. Et je vous remercie aussi de ce que nous allons faire autour de Jean-Pierre CAFFET dans les mois qui viennent, car la tâche n'est pas terminée, mes amis. Elle est tout à fait passionnante, mais on a encore beaucoup de boulot. Et tant mieux ! Je vous remercie beaucoup de ce débat.
(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et radical de gauche, communiste, du Mouvement républicain et citoyen et "Les Verts").