Libération (16/11/04)

 

Delanoë veut «âme» et «souplesse» pour les Halles
Deux des quatre projets apparaissent favoris: ceux de Koolhaas et Mangin.

Par Didier ARNAUD et Sibylle VINCENDON
mardi 16 novembre 2004



il n'a rien dévoilé, mais il se laissera des portes ouvertes. Hier, en marge
du Conseil de Paris, Bertrand Delanoë a un peu parlé des Halles. Pour
rappeler que la décision serait prise avant le 25 décembre. Le maire n'a
toujours pas «forgé sa décision», mais tous les débats sont utiles. Pour
lui, il faut «corriger» des choses aux Halles, pour que «ce lieu ait une
âme». Il ajoute: le choix du projet ne sera pas «nec variatur», mais «en
gardant la prudence que j'ai depuis le début. A un moment, il faut choisir,
donner une direction, mais même dans cette direction, il y aura encore de la
souplesse».

Comment interpréter ces propos ? Des quatre projets initialement dans la
course, deux paraissent sérieusement en lice : celui du Néerlandais Rem
Koolhaas et celui de David Mangin. Les deux autres semblent avoir moins de
chances, celui de Jean Nouvel parce qu'il densifie trop; et celui du second
Néerlandais, Winy Maas, parce qu'il est techniquement périlleux. On prête au
maire d'avoir, depuis le rendu du concours, un faible pour Koolhaas.
Certains de ses adjoints, dont Denis Baupin aux transports, ont souligné
publiquement les qualités fonctionnelles de ce projet, en particulier la
solution imaginée par Koolhaas pour évacuer la salle d'échanges du RER.

L'«âme» dont parle le maire pourrait être le parti marqué de Koolhaas. Et la
«souplesse», la possibilité de l'amender. En tenant compte de la
concertation, certaines associations ayant soutenu Mangin (collectif
Rénovation des Halles) tandis que d'autres épaulaient Koolhaas (collectif
Parole des Halles). Mais, alors que les mystères de Delanoë peuvent être
interprétés comme de l'irrésolution, les groupes de pression dévoilent leurs
batteries. Une partie des Verts, emmenée par l'adjoint à l'environnement
Yves Contassot, réclame Mangin (Libération du 6 novembre). Ce qui a entraîné
hier au Conseil de Paris une question de l'UDF pour savoir si le maire
céderait «à la minorité la plus conservatrice de la majorité municipale».

Plus discrètement, le groupe immobilier Unibail, propriétaire du centre
commercial, met désormais le paquet pour Mangin, lui aussi. Unibail a été
horrifié par le projet Koolhaas : en permettant aux voyageurs de sortir
directement de la salle d'échanges du RER vers l'extérieur, il détourne une
partie des flux des allées du centre commercial. C'est d'ailleurs grâce à ça
qu'il résout efficacement les problèmes d'évacuation de la salle, dont la
sécurité est aujourd'hui problématique. Pour éviter ce radicalisme, Unibail
a fait savoir qu'il autoriserait désormais ce qu'il refusait depuis plus de
vingt ans : une sortie de la salle d'échanges au coeur du centre commercial,
par la place Basse. C'est ce qu'a dessiné David Mangin au cours de la
troisième étape de l'été. Hier, au Conseil de Paris, l'adjoint à
l'urbanisme, Jean-Pierre Caffet, a répondu que la commission d'appel
d'offres n'était pas à la botte de tel ou tel groupe de pression et que le
choix se ferait en fonction de la sécurité et de l'intérêt des Parisiens.